Assassin's Creed: Unity - La qualité du pixel avant le nombre, une gestion minutieuse des PNJ, un univers plus sombre et une application plus poussée
par NobunagashiNous avons rencontré Alexandre Amancio, directeur créatif chez Ubisoft, ainsi qu'Andrée-Anne Boisvert, responsable du développement de l'application compagnon, qui ont bien souhaité répondre à nos questions.
Récemment, nous avons eu l'occasion d'essayer Assassin's Creed: Unity, le premier opus de la série pensé pour les consoles nouvelle génération. À cette occasion, une grande partie de l'équipe de développement était sur place, et nous avons donc eu le temps de passer un moment avec certains d'entre eux. Nous avons pointé notre micro vers deux d'entre eux en particulier, Alexandre Amancio, directeur créatif du jeu, ainsi qu'Andrée-Anne Boisvert, responsable du développement de l'application compagnon.
- Dans un premier temps, pouvez-vous vous présenter et détailler votre rôle dans le développement d'ACU ?
Mon nom est Alexandre Amancio et je suis le directeur créatif sur Assassin’s Creed: Unity. C’est moi qui suis le « lead créatif » sur le projet, c’est celui qui est responsable du bon respect de la vision globale du jeu et de la communiquer à tous les différents directeurs responsables des multiples parties du jeu. C’est comparable au réalisateur d’un film.
- AC: Unity est le premier Assassin’s Creed pensé pour la next-gen, qu’est-ce que cela apporte à la licence ?
Énormément ! C’est non seulement ce que la puissance [des nouvelles consoles] apporte, mais aussi ce que cela nous a permis de faire. On a refait la structure fondamentale du moteur pour être capable d’aller vers la new-gen. Cela nous a permis de redesigner et de reconstruire la plupart des fondamentaux du jeu. Les trois piliers, navigation, furtivité et combat, ont été refaits à zéro. Navigation plus fluide, plus de contrôle, le combat, plus de challenges, plus de profondeur et pour ce qui est de la furtivité nous avons ajouté beaucoup d’éléments. On a ajouté un bouton « stealth » pour être plus silencieux, un système de « cover », on a changé la façon qu’ont les ennemis de détecter le joueur, on a ajouté la dernière position connue… Beaucoup d’éléments ont été refaits de la sorte. La structure des missions aussi, on a ajouté un système de progression, on a tout changé pour rendre la structure du jeu plus moderne, plus « next-gen » pour supporter un réel open world, le narratif est plus profond, la performance des acteurs meilleure. Du coup, la next-gen nous a permis de faire techniquement le plus beau jeu open world présentement sur ces consoles. C’est un monde ouvert avec un système d’éclairage fantastique avec un vrai calcul de photons, des matériaux plus réalistes. On travaille sur des matériaux plutôt que des textures. On a aussi la plus grande ville qu’on a jamais faite, à une échelle réelle pour la première fois, avec des intérieurs. Un édifice sur quatre a des intérieurs dans Paris, la plupart des monuments principaux sont modélisés avec leur intérieur. On a des souterrains, des égouts, des catacombes, et tout ça se fait sans temps de chargement et avec jusqu’à plus de 5000 PNJ à l’écran. On a même une scène avec 10000 PNJ.
- Et comment vous gérez tous ces PNJ ?
Le secret pour faire une foule aussi impressionnante de 5000 à 10000 PNJ est basé en fait sur une étude sur le mouvement des humains en foule. On s’est rendu compte que quand on a beaucoup d’humains pour une densité X, les mouvements peuvent être prévisibles par un algorithme. Après il y a différents thèmes, une foule tranquille, une foule mouvementée… mais, en soi, on peut gérer le mouvement de la foule presque comme un fluide. Notre foule est calculée mathématiquement et c’est là qu’intervient la vraie magie : on a la capacité de générer des IA complètes sur n’importe quelle entité de cette foule. Ce qu’on voit dans le jeu c’est que constamment, on est en train de transférer une IA complexe en un ensemble. Il y a toujours un échange entre intelligence complète et foule générée. Par exemple, si on est sur un édifice et qu’on lance un feu d’artifice dans la foule… quand il va tomber sur le sol, il va y avoir un rayon d’intelligence qui va être généré qui fait que chaque PNJ autour du feu d’artifice va réagir… il y a une contamination d’intelligence qui va faire naître d’autres intelligences complètes, puis quand ils se retrouvent un peu plus loin, ils redeviennent une partie de la foule. C’est un système hyper complexe qui gère tout ça !
On a opté pour la qualité du pixel plutôt que pour le nombre de pixels.
- C’est énormément de choses à gérer en même temps, mais est-ce qu’on peut s’attendre à une résolution et un framerate optimal sur chacune des plateformes avec tout ça ?
On a opté pour un framerate de 30 FPS. Sur un FPS, vu la nature du jeu, le 60 FPS est préférable, parce que la fluidité est primordiale. Pour un jeu d’action/aventure, le 30 FPS donne un look et un ressenti beaucoup plus cinématographique que le 60 FPS et c’est vraiment ce qu’on recherchait. En termes de résolution, en fait on a opté pour la qualité du pixel plutôt que le nombre de pixels. Ce qu’on a fait, c’est qu’on a cherché le bon ratio entre la résolution et la quantité de polygones, d’effets spéciaux et de textures à l’écran pour donner la meilleure image possible. Sur Xbox One on atteint le 900p, mais je pense que l’image obtenue parle d’elle-même.
- Le développement d’Unity a pris 4 ans. Est-ce que c’est beaucoup par rapport aux autres opus et pourquoi un développement aussi long ?
C’est effectivement beaucoup… Les cycles de production varient généralement entre 24 et 36 mois. Ici, 48 mois ont été nécessaires à cause du saut de génération. C’est la première fois qu’on faisait un jeu architecturalement pensé pour la nouvelle génération. Il a fallu tout recoder. Cela représente 6 millions de lignes de code. Et pendant qu’on recode, on peut redesigner aussi, c’est pour ça qu’on a pu apporter autant d’améliorations. Tout cela est possible parce qu’on a eu effectivement énormément de temps pour livrer le jeu.
- Nous avons remarqué plus de sang durant nos essais, Assassin’s Creed: Unity est-il volontairement plus mature pour mieux coller au sujet sérieux qu’est la Révolution française ?
Effectivement. Mais c’est sûr que quand on rend le jeu plus réaliste, les éléments violents vont davantage ressortir, cela va de soi, on a plus de détails. Et oui, ça allait bien avec la thématique. La Révolution française est une période de contrastes, l’humanité a beaucoup progressé, comme la charte des droits de l’homme, mais en contrepartie on a aussi la Terreur, les massacres de septembre, donc du coup, c’est un monde qui est plus violent, plus cru, pour coller au réalisme.
Le but ultime est de faire en sorte que le protagoniste du jeu soit le joueur.
- Pour le moment on a vu Arno et Paris, mais à aucun moment nous avons vu la partie du jeu se déroulant dans le présent, de l’autre côté de l’Animus. D’AC 1 à 3, cette partie relatait l’histoire de Desmond, dans le 4 c’était un peu différent puisque c’était un employé d’Abstergo, à quoi peut-on s’attendre pour celui-ci ? Est-ce la suite directe du 4 ?
C’est une évolution ! Le cycle d’Assassin précédent se termine avec Assassin’s Creed Rogue. Nous, on commence vraiment un nouveau cycle. Du coup, c’est un nouveau début, c’est un nouveau contexte. C’est normal, n’importe quelle marque, surtout une marque hautement narrative, se complexifie avec le temps. Donc c’est tout à fait normal à un certain point de proposer un renouveau pour permettre non seulement aux fans d’avoir une nouvelle progression, mais aussi pour que de nouveaux fans puissent rejoindre la licence sans avoir le fardeau narratif de ce qui est arrivé avant. Typiquement, les jeux Assassin commencent par un « précédemment… ». Là, il n’y en aura pas ! C’est un nouveau début. On essaye de s’adresser à tous et le but ultime est de faire en sorte que le protagoniste du jeu soit le joueur.
- Pourquoi avoir limité le mode co-op à certaines missions uniquement et ne pas avoir rendu le jeu entièrement jouable à plusieurs ?
Il y a plusieurs raisons. Lorsqu’on a commencé à analyser le co-op pour essayer de trouver la formule, on s’est rapidement rendu compte que lorsqu’on lie narrativement des missions, ça créé une énorme friction au co-op. Par exemple, tu joues avec tes potes quotidiennement, puis un jour tu ne peux pas y aller… tu les rejoins le lendemain, ils sont deux séquences plus loin… qu’est-ce qu’on fait ? Est-ce que tu sautes deux séquences et l’histoire ou est-ce qu’ils doivent rejouer toute une partie qu’ils ont déjà faite ? Du coup, les missions en co-op ont été « dézonées » pour avoir un aspect narratif contenu. Ce sont des histoires en soi qui ont un début, un milieu, une fin. C’est assez simple parce qu’on s’est rendu compte aussi que les joueurs qui jouent en co-op, dès qu’il y a quelque chose de trop complexe, des cinématiques… se lassent. Ça enlève tout le plaisir. Ce sont des missions très simples dont le contexte tourne autour de personnages historiques iconiques de l’époque ou un événement ou un monument. La cinématique de début a presque l’air d’un trailer de film au lieu d’une histoire très développée… C’est ce qu’on a trouvé qui se prête le mieux au co-op. En fait on a créé du contenu parfaitement adapté au co-op plutôt que d’essayer d’adapter des missions qui ne l’étaient pas forcément.
- Est-ce que le design d’Arno est inspiré d’une personne réelle comme un acteur ou un membre du studio ?
Non, il est venu comme ça. C’est l’artiste qui l’a dessiné qui lui donne son premier look, puis quand on le fait en 3D, l’artiste 3D ajoute sa propre touche. Du coup, c’est une évolution, et au final, on se retrouve avec un personnage sur lequel le DA (Directeur Artistique, ndlr) donne son avis et des ajustements sont faits.
- Assassin’s Creed: Unity a été rendu plus difficile, plus orienté furtivité que combats… À une époque où une grande majorité des jeux s’orientent vers la casualisation, n’avez-vous pas peur qu’il soit boudé par sa difficulté ?
C’est un point qu’on a considéré, et en fait, oui, on ajoute du challenge aux combats, ce qui ne veut pas dire que le jeu en soit est plus difficile. Ce qu’on a fait c’est qu’on a mis plus de poids sur l’imagination du joueur. Je vais donner un exemple concret. Si on voulait que le joueur passe par la porte principale, qu’on mettait 20 gardes devant et que les tuer était hyper difficile, ça deviendrait hardcore. Nous on a choisi de mettre ces 20 gardes devant la porte, tout en laissant la possibilité d’analyser la scène et d’utiliser son imagination pour résoudre la situation par d’autres moyens. Dans ce cas, le challenge n’est plus dans la manette, mais dans la tête des joueurs. On ne force pas le joueur à passer par le côté challenging. Par contre, si le joueur, après avoir passé dix fois la mission, décide la onzième fois de passer par la porte et tuer tous les gardes, et qu’il essaye plusieurs fois avant de réussir… c’est son choix à lui. On essaye vraiment de créer un jeu qui a une longévité parce qu’il laisse au joueur la possibilité de résoudre les situations de plusieurs façons.
- Un premier DLC a déjà été annoncé et se déroulera à Saint-Denis. Est-ce qu’on peut s’attendre à voir d’autres zones d’Ile-de-France s’ouvrir dans de futurs DLC ?
Ça je ne peux pas le dire, mais on a un jeu qui se prête tout particulièrement aux DLC, qu’ils soient gratuits ou payants, comme de nouveaux équipements, de nouvelles couleurs de costume… Ce sont des choses qu’on envisage.
Commenter 6 commentaires
Et comme ce gars le dit, la continuité logique est Rogue, puis Unity. Je commencerais donc par Rogue.
J'espère tout de même qu'on oubliera *pas* les illustres Assassins et qu'ils auront leur place dans la Base de données de l'Animus.
Assassin's Creed est mort après le départ de Patrice, Unity ces genre Assassin's Creed pour tout le monde, pas de vrai scenario, pas de vrai intrigue, juste un jeu bien bourrin, ou tu assassine chaque cible.
ACR a été un bon pilier pour la série met le AC3/ACBF sont des épisode qu''il ne fallait pas faire.
Arrête ce temps péremptoire stp. Que tu ne les aies pas aimé c'est une chose, que personne ne doivent les faire, ceux qui les ont appréciés auraient certainement envie de te dire "TG OSEF"