TEST Windjammers 2 : notre spécialiste s'attarde sur la suite du mythique titre de la Neo Geo !
par Terence F.Windjammers 2 : Une nouvelle expérience en vue. Décryptons le phénomène Windjammers 2 !
Windjammers premier du nom
Annoncé dès 2018, la suite du mythique Windjammers est enfin sortie le 20 janvier dernier. Loin de profiter d'une campagne de communication digne d'un AAA, la nouvelle mouture du jeu paru en 1994 sur Neo Geo n'en demeure pas moins un évènement particulièrement attendu par tout un public. Et à juste titre... Il y a quelques années, Dotemu, notre champion français du dépoussiérage de vieux trésors, a redonné vie au monstre vidéoludique d'antan, Windjammers. Avoir choisi de relancer un tel titre sur le devant de la scène était tout sauf anodin. Développé originellement par DataEast, Windjammers est l'un des premiers jeux de l'histoire, aux côtés de Street Fighter II et consorts, à être résolument tourné vers l'e-sport. À une époque où tout était encore à définir, il permettait à deux joueurs de s'affronter à un jeu de type Pong où le but est de marquer des points avec un frisbee que l'adversaire ne doit pas réussir pas à rattraper. Malgré ses 28 ans bien tassés, il a su conserver toute sa superbe, autour d'une énorme fanbase, notamment en France où la communauté rassemble les meilleurs joueurs mondiaux.
Plus nous progressons, plus nous découvrons la dimension du mind-game.
Le gameplay reposant sur un système à seulement deux boutons était pourtant étonnamment riche, puisque nous pouvons bien sûr nous déplacer sur toute notre partie de terrain, effectuer des glissades (dash), tirer avec ou sans effet (il en existe 8 différents), faire des lobs ou encore effectuer un toss, un coup qui s'il est effectué au moment parfait fait monter le frisbee en l'air, donnant le temps au joueur de charger et déclencher un coup spécial propre à chaque personnage.
Chacun possède ses propres caractéristiques : vitesse de déplacement, puissance des coups, distance de dash, quantité d'effet, tir spécial, etc. Et c'est très certainement la variété, mais surtout l'équilibrage quasi parfait de ces caractéristiques entre tous les personnages, qui a donné une profondeur de gameplay incroyable à ce titre, lui permettant de traverser les générations sans rougir. La prise en main se fait en quelques minutes à peine, mais même après des années de pratique nous continuons toujours à progresser. Et rares sont les jeux à aussi bien se prêter à cette maxime. Comme dans les grands jeux de versus fighting, plus nous progressons, plus nous découvrons la dimension du mind-game et mieux nous comprenons ce qui nous sépare des champions du jeu. Si nous devons résumer ce premier opus en une phrase : riche, équilibré et particulièrement accessible. C'est vraiment sur ces accomplissements que Windjammers a construit son succès au fil des décennies.
Petit aparté - Point sur la franchise, de Windjammers à Windjammers 2
Alors que la communauté de joueurs n'a jamais cessé d'organiser des tournois sur borne ou en ligne sur Fightcade, Dotemu a surpris tout le monde en acquérant les droits de cette licence en 2016 et en sortant l'année suivante une nouvelle version du jeu pour les consoles du moment (PS4, PSVita puis Switch). L'objectif de ce remake était de proposer ce jeu sur les machines HD (et en 16/9), en conservant l'esthétique pixel art de l'époque et surtout sans dénaturer les sensations du jeu d'origine tout en apportant la possibilité de jouer en ligne.
Pour réussir ce pari, Dotemu avait déjà eu l'excellente idée de faire intervenir, en tant que consultants, des joueurs issus de la communauté Windjammers France, regroupant quasiment tous les meilleurs joueurs de la planète. C'était loin d'être gagné d'avance notamment concernant le gamefeel, car en 60 fps, en HD 16/9 et avec les contrôleurs modernes, réussir à proposer un jeu aux sensations strictement identiques pour des joueurs ultra-exigeants qui jouent à ce jeu depuis plusieurs décennies s'annonçait comme un vrai casse-tête.
Pourtant Dotemu a réussi son pari et nous a gratifiés d'une excellente mouture, s'appuyant sur un netcode en rollback extrêmement propre permettant à des joueurs, même éloignés de plusieurs milliers de kilomètres de jouer à un jeu ultra-exigeant dans des conditions incroyablement bonnes.
Cette sortie sur les consoles du moment a naturellement favorisé l'organisation de grands tournois à travers le monde, jusqu'aux championnats du monde, qui se sont déroulés durant l'EVO 2018 et 2019. Notre joueur français Pyrotek, leader du classement mondial et véritable légende du Flying Power Disc, s'y est illustré, remportant la ceinture de champion du monde à deux reprises. Il est toujours tenant du titre à ce jour.
L'excellent travail réalisé sur ce remake a certainement donné des ailes à Dotemu. Annoncé en 2018, il lui aura donc fallu presque 4 années pour produire la suite inespérée de Windjammers. Pendant ces 4 années, Dotemu aura travaillé pour trouver comment moderniser la formule et améliorer le gameplay sans perdre le charme et la profondeur du premier épisode. Comme pour le remake, Dotemu s'est naturellement entouré des meilleurs joueurs de Windjammers pour parfaire la formule de la suite et éviter toute fausse note. Véritables consultants pour le jeu, c'est avec plaisir que nous retrouvons les noms et pseudos de ces joueurs (français pour la plupart) dans les crédits de fin de mode Arcade ! Pyrotek encore, mais aussi Keikun, Eleazar ou DonYann – autant de pseudos qui sont familiers pour la communauté française.
Un roster plus varié
Dans Windjammers 2, la première chose qui saute aux yeux, c'est bien sûr la direction artistique choisie pour ce deuxième épisode. Exit le pixel art de 1994, bonjour le nouveau rendu 2D flashy dessiné à la main et aux couleurs chatoyantes. Une fois n'étant pas coutume, les animations des personnages sont absolument sublimes, et c'est aujourd'hui l'une des marques de fabrique de Dotemu.
Windjammers 2 apporte de nouvelles règles avec les nouvelles arènes.
Sans surprise, Windjammers 2 s'appuie totalement sur le gameplay du premier opus. Comprenez par là que tout ce que vous pouviez faire dans Windjammers, vous pouvez le refaire dans Windjammers 2. Il est toujours question de marquer des points, 15 désormais pour gagner un set, et il faut gagner 2 sets pour remporter le match contre votre opposant. Concernant le roster, les 6 personnages historiques sont toujours présents. Nous retrouvons dans le désordre : le brutal Klaus Wessel, Gary Scott, Steve Miller, Loris Biaggi, Jordi Costa et Hiromi Mita – seule femme au casting du premier épisode. À ces 6 personnages, vous pouvez ajouter Jao Raposa, un Brésilien hyper véloce, Max Hurrican, un autre Américain surpuissant, Sammy Ho, un Chinois très polyvalent, et Sophie de Lys, une autre femme qui représente la France.
Là où Windjammers définissait des stéréotypes assez marqués dans les caractéristiques des personnages (vitesse, dash, puissance, effet), Windjammers 2, à travers ses nouveaux venus, propose des alternatives. Comprenez des personnages permettant de mieux trouver chaussure à son pied. Au-delà des caractéristiques chiffrées, chaque personnage possède aussi une Super Custom, c’est-à-dire une super attaque qui lui est propre.
Au niveau des arènes, Windjammers 2 a encore fait le choix de conserver la plupart de celles qui existaient dans Windjammers et d'en ajouter de nouvelles. Nous retrouvons donc Beach, le niveau le plus simple et étroit, Tiled, comme cette dernière, mais en un peu plus grand, Lawn qui est encore plus vaste, Clay avec deux bumpers au centre qui peuvent dévier le frisbee, et Stadium qui est l'arène la plus grande et possède la particularité d'avoir la zone à 5 points évoluant sous la forme d'un handicap pour le joueur qui mène. Car oui, il existe des zones rapportant un nombre de points différents. Suivant où le frisbee termine sa course, vous marquerez 3 points ou 5 points, en fonction de l'arène. Et s'il tombe au sol, vous engrangerez 2 points.
C'était ainsi dans Windjammers et ça reste vrai dans toutes les arènes conservées ! Mais Windjammers 2 apporte de nouvelles règles avec les nouvelles maps. À commencer par Rooftop, qui reprend l'ancienne carte Concrete avec deux bumpers situés en haut et bas, mais avec désormais 4 points marqués si le frisbee tombe au sol. Ring et Arena sont deux nouvelles zones très similaires dites « larges », profitant du format 16/9, l'une apportant 2 points lorsque le frisbee tombe à terre, l'autre 4. Junkyard est aussi une arène large, avec deux bumpers centraux qui ont la particularité de se déplacer verticalement lorsque le frisbee les percute, rendant le jeu extrêmement imprévisible. Enfin, Casino fait la taille de Stadium, mais le nombre de points marqués y dépend du nombre inscrit sur le frisbee, allant de 1 à 8 points ! Comme avec les nouveaux personnages, les nouvelles arènes sont là pour apporter des alternatives et de la variété du fait qu'elles ont leurs particularités et des règles pouvant leur être propres. Et sans surprise, cette variété vient épauler les nouveautés apportées au gameplay.
Un gameplay toujours plus solide
Car c'est bien au niveau du gameplay que Windjammers 2 veut gagner ses lettres de noblesse. Adieu le système de jeu à 2 boutons, bienvenue à celui à 4 boutons ! Un petit tutoriel (beaucoup trop léger hélas) présente d'entrée de jeu tous les mouvements disponibles, et aux habituels coups classiques et lobs viennent désormais s'ajouter le slash shot et le drop shot. Le slash shot est une baffe que vous pouvez donner au frisbee au moment où il vous arrive dessus, le renvoyant vivement et immédiatement à l'adversaire. Le drop shot est quant à lui un amorti retombant juste derrière le filet.
Il est à présent aussi possible de sauter. Si vous interceptez le frisbee lorsque vous êtes en l'air, vous avez une fenêtre pour effectuer divers coups comme notamment écraser le frisbee au sol du côté adverse. Ces nouveaux coups qui peuvent se combiner offrent d'incroyables possibilités pour gérer chaque situation de jeu. Ils apportent du dynamisme, accroissent l'effet mind-game cher aux joueurs de versus fighting, et seront des armes maîtresses pour imposer ou casser un rythme de jeu en match. Dotemu a ainsi réussi le pari de renouveler le jeu de frisbee sans rien perdre de Windjammers et sa profondeur époustouflante, tout en ajoutant encore une dimension de jeu d'une richesse incroyable.
Si le gameplay nous a totalement convaincus, qu'en est-il des modes de jeu proposés à la sortie du jeu ? Ils sont malheureusement maigres... Nous avons un habituel mode Arcade (disponible dans 3 niveaux de difficulté) présenté sous la forme d'une brève campagne consistant à gagner 5 matchs contre l'ordinateur et ponctués de 2 bonus stages. Le premier consiste à rattraper des frisbees envoyés à un rythme effréné par une machine, le second rappelle des souvenirs, puisqu'il s'agit de lancer le frisbee le plus loin possible sur une plage et de le rattraper avec un chien que nous dirigeons. Sympathique, mais léger.
Nous avons aussi naturellement un mode Versus local pour affronter un ami et un mode en ligne permettant de joueur en amical contre un joueur aléatoire, en classé ou en ligne contre un ami que vous invitez. Comme pour le remake du premier épisode, Dotemu nous fournit un netcode très robuste, en rollback (obligatoire pour un jeu aussi réactif) qui permet de jouer dans d'excellentes conditions contre quasiment n'importe qui. Avant de rédiger ce test, nous avons fait près d'une centaine de matchs en ligne et nous n'avons subi aucun bug notoire, aucune déconnexion intempestive non plus. Bien sûr, les désagréments habituels du rollback se font sentir lorsque votre adversaire a une connexion épouvantable. Ainsi, avec un ping dépassant les 300 ms, vous verrez votre adversaire se « téléporter » et, même si le jeu devient beaucoup moins plaisant, il n'en demeure pas moins tout à fait jouable.
Malheureusement, c'est tout concernant les modes de jeu. C'est donc maigre, d'autant plus pour un jeu compétitif. Le tutoriel proposé se contente de donner les touches pour réaliser chaque coup. Aucun mode Entraînement par exemple, que nous retrouvons généralement dans les jeux de combat pour travailler et apprendre à maîtriser chaque coup et combo. Les jeux Windjammers sont très exigeants et mettront à rude épreuve votre mémoire musculaire, l'absence de mode permettant de travailler chaque facette du jeu manque vraiment, car il est difficile d'apprendre à réaliser de nouveaux coups dans la tension d'un match.
Windjammers 2, un cru d'exception ?
Véritable hommage à une œuvre culte, Dotemu a pris le temps pour offrir à Windjammers une suite à sa hauteur. Manette en mains, nous ressentons bien à quel point absolument tout a été parfaitement réfléchi, pensé et équilibré pour définir un véritable sport. Oui, Windjammers 2 est une vraie réussite. Sans surprise, il devrait naturellement prendre la place de son prédécesseur au sein de la communauté qu'il a créée et s'inscrire comme une référence pour les années à venir. La scène compétitive ne lui tourne pas le dos, c'est une certitude. Oui, mais Windjammers était déjà un jeu de niche. Est-ce que Dotemu, avec ce second opus, réussit le tour de force d'en faire un jeu plus grand public ? Nous sommes malheureusement plus mitigés à ce sujet, notamment à cause du manque d'accessibilité pour un joueur débutant.
Sur ce point, Windjammers 2 reste aussi austère que son ancêtre, mais avec un gameplay nettement plus difficile à maîtriser. Après avoir rapidement fait le tour d'un mode Arcade peu captivant, tout joueur devrait ensuite s'essayer au online. Et s'il n'y a pas suffisamment de joueurs connectés pour garantir un matchmaking équilibré, le débutant risque rapidement de n'affronter que des joueurs confirmés, venant pour la plupart de Windjammers et donc difficilement prenables. Et en l'absence totale de mode Entraînement, cette marche risque d'être trop haute pour le joueur qui découvre le jeu, risquant de le décourager.
Et c'est finalement bien ça le seul reproche que nous pouvons faire à Windjammers 2. Ses mécaniques de jeu, la profondeur de son gameplay et l'incroyable richesse des situations qu'il propose le place aux côtés des meilleurs jeux de versus fighting ayant vu le jour jusqu'à présent. Le succès auprès du public compétitif devrait être garanti. Mais son manque d'accessibilité risque aussi de le rendre difficile à apprécier pour un nouveau venu, ce qui est extrêmement dommage. Il n'est cependant pas trop tard pour corriger le tir et nous pouvons espérer que Dotemu entende ces demandes pour nous proposer, dans une mise à jour ultérieure, un mode Entraînement digne du bijou qu'il a réalisé.
- Une véritable leçon de gameplay de la part de Dotemu
- Une direction artistique originale et très soignée
- Un véritable hommage pour le matériau d'origine et beaucoup de respect envers la communauté
- Un jeu taillé pour l'e-sport moderne
- Une immense durée de vie pour le joueur persévérant...
- … mais un cruel manque d'accessibilité pour le joueur débutant
- Trop peu de modes de jeu (et pas de mode Entraînement)