Un nouveau personnage emblématique de la Maison des Idées débarque sur grand écran : Carol Danvers, alias Captain Marvel. Cette nouvelle « origin story » trouve-t-elle sa place dans le MCU ?
Un parti-pris complexe
Le problème avec le Marvel Cinematic Universe, c’est qu’à moins d’être particulièrement assidu depuis le début, il est difficile d’en cerner clairement toutes les mécaniques. Et quand bien même tous les films des différentes phases ont été avalés lors d’un nouveau marathon geek, il y a toujours des zones d’ombre. Manquement scénaristique, trou de mémoire, ou espace laisse délibérément vide pour être comblé plus tard ?
Pendant un peu plus de deux heures, le spectateur est invité à en apprendre beaucoup sur le personnage.
Captain Marvel fait clairement partie de la troisième catégorie. Le 21e film du MCU est une « origin story » : comprenez qu’il raconte les origines de la super héroïne, campée par Brie Larson, oscarisée en 2015 pour Room. La comédienne de 29 ans prête ses traits à Vers, une extraterrestre de la race des Kree qui, lors d’une mission de routine, se retrouve capturée par les Skulls, une autre race alien bien connue des habitués du MCU. Grâce à ses pouvoirs, Vers parvient à s’échapper et atterri sur Terre, où elle attire l’attention d’un certain Nicholas Fury, jeune agent du SHIELD...
Pendant un peu plus de deux heures, le spectateur est invité à en apprendre beaucoup sur le personnage. Et par beaucoup, il faut comprendre bien plus qu’espéré de base : le film construit très finement les origines de l’héroïne, qu’il s’agisse de son côté Carol Danvers que celui de Captain Marvel. En vérité, les deux sont bien évidemment intimement liés, mais le film valorise énormément l’ascension de l’héroïne au-delà de ses pouvoirs.
Cela fait clairement partie des ambitions de Marvel Studios de concevoir ses films d’origine différemment. Captain Marvel est d’ailleurs l’un des films du MCU les moins linéaires scénaristiquement : là où la plupart des films qui racontent la genèse d’un personnage le font en suivant un déroulé très chronologique, le métrage réalisé par Anna Boden et Ryan Fleck n’hésite pas à brouiller les pistes en mélangeant les temporalités, ce qui donne plus d’épaisseur au scénario, et permet de construire un personnage plus complexe. C’est d’autant plus intéressant qu’avec la puissance qui se dégage de Captain Marvel, il aurait été dangereusement facile d’en faire une héroïne très lisse, sans réel intérêt.
Féministe, mais pas que
Ce ne sera, par ailleurs, une surprise pour personne que le personnage dégage une forte aura féministe, plutôt bien intégrée au propos. L’un des plus puissants héros du MCU est désormais une femme, et cela ne pouvait pas se faire sans aller de pair avec une forte aura « girl power », que le scénario parvient à mettre en avant dans sa mise en scène, notamment par le biais de deux scènes au montage parfait, et quelques dialogues bien trouvés. La production a pris le soin d’intégrer Kelly Sue DeConnick, scénariste de comics activement féministe réputée pour avoir réhabilité le personnage de Captain Marvel au début des années 2010. Il y a fort à parier que l’autrice, qui apparaît d’ailleurs dans le film sous la forme d’un caméo furtif, n’est pas pour rien dans cette démarche. Il est cependant regrettable que, à l’image de Wonder Woman dans le film du même nom, Carol Danvers ait forcément besoin d’un entourage masculin pour se révéler pleinement.
La dimension féministe de Captain Marvel est loin d’être sa seule force.
Pour autant, la dimension féministe de Captain Marvel est loin d’être sa seule force. Le film développe efficacement son personnage vedette, mais étoffe également considérablement la mythologie du MCU. C’est d’ailleurs l’une des vraies surprises du film : alors qu’il était facile de voir Captain Marvel comme une sorte de deus ex machina, un personnage sorti du chapeau pour résoudre la situation complexe en place à la fin d’Infinity War, le long-métrage fait bien plus en donnant davantage de profondeur aux origines des Avengers. Forcément, en plaçant l’intrigue dans les années 90 et en mettant en scènes aux côtés de Danvers un jeune Fury plein d’ambitions, il y avait matière. Il est très réjouissant de constater que le film n’est pas une succession de scènes nostalgiques des années 90, mais qu’il exploite bien cette temporalité pour continuer de tricoter le MCU - ce que Captain America avait également bien géré en son temps.
En somme, Captain Marvel n’est sans doute pas le meilleur des films des MCU - en vérité, aucune des « origin stories » ne peut prétendre à ce trophée -, mais il propose une nouvelle histoire intéressante à découvrir, en cohérence avec l’univers de Marvel Studios, et qui parvient à se construire une identité propre. Cela augure du bon pour la suite des aventures de Carol Danvers, qui sera présente dans Avengers: Endgame, en salles dans deux mois.
Pour finir, ne partez pas de la salle tout de suite : deux scènes bonus sont présentes, en milieu et en fin de générique. Normalement, vous le savez déjà, mais dans le doute, vous êtes prévenus !
Note : 5 étoiles sur 5