10 ans après Le Vent se Lève, Hayao Miyazaki renfile sa casquette de réalisateur pour Le Garçon et le Héron. Le metteur en scène japonais entre dans le dernier arc de sa filmographie avec une réalisation plus mature que jamais.
Il était une fois...
Sorti de sa retraite annoncée après Le vent se lève en 2013 (disponible en Blu-ray à partir de 14,99 € sur Amazon.fr), Hayao Miyazaki reprend du service cette année avec Le Garçon et le Héron, paru cet été sans aucune bande-annonce et avec très peu de promotion au Japon. Le film du mythique réalisateur de films d'animation nippon ne sera pas entouré d'autant de mystère pour sa sortie en France le 1er novembre, mais cela n'entachera en rien ses qualités. Surtout que le synopsis n'a pas tant besoin que cela d'être tenu secret, sauf si vous voulez vous réserver entièrement pour le jour de votre visionnage : dans ce cas-là, comme pour n'importe quelle autre critique, nous vous conseillons de passer votre chemin sur la nôtre.
Probablement l'une des œuvres les plus inaccessibles de son réalisateur, par sa maturité et la difficulté à apprécier son discours.
L'histoire nous fait suivre Mahito Maki, un jeune garçon qui a perdu sa mère suite à une frappe aérienne ayant causé l'incendie d'un hôpital où résidait sa mère durant la Seconde Guerre Mondiale. 3 ans plus tard, son père est désormais amoureux de la sœur cadette de sa feu épouse, décide de quitter Tokyo pour aménager en campagne chez sa nouvelle compagne, emmenant sa progéniture avec lui. Notre jeune protagoniste, lui encore endeuillé, va croiser la route d'un héron bien vindicatif, qui va lui confier que sa mère est encore vivante. Le point de départ d'une aventure entre espoir et tourment, avec forcément la dose de magie que nous pouvons attendre de Hayao Miyazaki.
Ce prémisse basique nous occupe durant le premier tiers de ce long film d'animation de plus de 2 heures, où la narration lente laisse parfois place à l'ennui. Une fois le voyage vraiment lancé, les choses s'accélèrent forcément, et défilent, sans vrai sursaut. Les quelques bizarreries et mignonneries de principe sont de la partie, pour des doses d'humour et des décalages presque trop rares tant ils font mouche quand ils sont réussis. Mais les pérégrinations de notre adolescent attristé, des personnages secondaires creux ainsi qu'une faible mais étonnante dose d'hémoglobine, qui rend le visionnage clairement déconseillé aux plus jeunes, dégagent un ton majoritairement morne.
Surtout, s'il y avait une métaphore, une analogie ou quelconque autre figure de style permettant de tisser un lien entre les péripéties surréalistes de Mahito et ses peines de jeune garçon, nous sommes visiblement passés à côté, tout comme des émotions censées aller avec. De cette histoire pourtant inspirée d'un roman philosophique (Et vous, comment vivrez-vous ? de Genzaburô Yoshino), nous repartirons ainsi seulement avec la belle morale finale sur l'héritage, tardive et qui n'explique pas tout le périple qui la précède, où le réalisateur semble déjà poser les bases de l'édifice de sa postérité.
Ne restait donc pour nous occuper que la plastique. En termes d'ambiance, Studio Ghibli sait y faire, avec des environnements parfaitement dessinés, des scènes aux effets visuels grisants transcendant les effluves de feu ou de vent, et des compositions musicales si belles qu'elles seraient presque en décalage avec la monotonie de la narration. Il y aurait cependant à redire sur l'animation, le coup de crayon des personnages très classique semblant parfois daté voire raté, et les moments visuellement épatants étant finalement rares. De même, la direction artistique manque d'envergure, le voyage entre ruralité et surnaturel qui s'y prêtait pourtant n'offrant que peu de cadres mémorables.
Tous les codes du réalisateur sont là, des décors fascinants aux personnages traditionnels et presque vieillots, des musiques qui font fondre nos cœurs aux êtres mignons et effrayants qui donnent directement vie aux univers fantastiques. Mais long au démarrage et nous laissant souvent dans l'attente d'un sens métaphysique qui n'arrive que très tardivement, Le Garçon et le Héron n'a pas les attraits qui permettent de sublimer ses histoires, et de leur donner charme et profondeur. Probablement l'une des œuvres les plus inaccessibles de son réalisateur, par sa maturité et la difficulté à apprécier son discours, qui tient beaucoup plus du début de testament pour les cinéphiles habitués que d'émerveillement destiné aux plus jeunes.
Note : 2,5 étoiles sur 5
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