TEST Life is Strange: True Colors, un titre qui nous en a fait voir de toutes les couleurs
par Auxance M.Life is Strange: True Colors : Deck Nine Games reprend le flambeau de Dontnod pour continuer à faire vivre la saga Life is Strange. L'héroïne Alex est-elle aussi mémorable que les autres protagonistes de la saga ?
L'étrange destin d'Alex Chen
La licence restera à jamais le bébé de Dontnod Entertainment, mais c'est bien chez Deck Nine Games, responsable de la préquelle Before the Storm, que nous retrouvons un Life is Strange: True Colors. Dans la lignée des épisodes canoniques précédents, c'est avec un nouveau casting, mais toujours dans le même vaste univers, que allons vivre une aventure narrative sur fond d'émotion et de super-pouvoir.
Le fait de revenir plusieurs fois dans les mêmes lieux et surtout de recroiser souvent certains personnages favorise l'attachement.
Le don d'Alex Chen, c'est aussi la source d'une partie de ses malheurs : il lui permet de lire les émotions des gens. Tourmentée par ses antécédents familiaux difficiles, elle va rejoindre son frère dans le village isolé de Haven Springs après plusieurs années en foyer, pour renouer avec Gabe et repartir sur un bon pied. Mais une fois la découverte de cette agréable communauté rurale et montagnarde passée, les secrets qui l'entourent vont troubler le retour sur le droit chemin de la jeune femme.
C'est donc une aventure plus sédentaire qui s'offre à nous, avec des passages répétés à l'appartement d'Alex et la rue centrale du village, donnant accès à un magasin de vinyles, un bar chaleureux ou encore une boutique de CBD. Le fait de revenir plusieurs fois dans les mêmes lieux et surtout de recroiser souvent certains personnages favorise l'attachement, même si tous les protagonistes n'ont pas le même capital sympathie. Alex, Gabe et Steph sortent du lot, à tel point que le choix de romance entre deux de nos camarades paraît un peu biaisé.
True Colors souffre d'ailleurs du même syndrome que ses prédécesseurs, à savoir que nos nombreux choix ne découlent que sur de faibles divergences narratives. L'architecture générale reste globalement identique pour tous les joueurs, et les embranchements se laissent assez facilement deviner, peut-être même encore plus que par le passé. L'apparente liberté sert cependant l'immersion : certaines sous-histoires parfois très mineures peuvent être partiellement ou totalement loupées, forçant le joueur à prendre son temps et à explorer autant que possible Haven Springs.
Le gameplay reste également très proche des aventures précédentes, avec peu d'autres choses à faire que se déplacer et discuter. Toutes les phases qui changent un peu n'en deviennent que plus intéressantes, d'un passage à l'approche RPG aussi sympathique que simpliste à des bornes d'arcade utilisables. L'expérience reste cependant très fluide, avec des phases d'exploration et des dialogues dynamiques, même si ce léger problème de rythme dans les dialogues persiste, avec parfois des échanges qui manquent un poil de réactivité et cassent un peu le charme.
La couleur des sentiments
Notre principal regret vient de ce qui aurait pu être le meilleur atout de True Colors, à savoir la possibilité de lire les sentiments des autres, et surtout les pensées qui leur sont associées. Déjà, parce que la grille de lecture est limitée, avec seulement de la colère, de la peur, de l'inquiétude et de la joie à déceler, simplement en pressant un bouton dédié. Ensuite, car les émotions lues sont rarement étonnantes, même si les quelques contradictions que nous allons déceler vont mécaniquement être au cœur du scénario. Et enfin, justement, car tout ce don ne reste qu'une partie mineure de l'histoire : que ce soit au niveau du périple où de l'évolution de la personnalité d'Alex, les grandes lignes n'auraient finalement pas été si différentes si elle n'avait pas eu ce pouvoir.
La musique est partout.
Les rebondissements sur fond de complot, de citoyens au lourd passé et de drame familiaux font malgré tout l'affaire, même si le grand final aurait gagné à être plus original, peut-être justement en jouant davantage la carte du fantastique, trop mis de côté, et en utilisant davantage les choix du joueur. Le fait d'avoir sorti le titre d'un bloc tout en gardant le chapitrage sous forme d'épisodes permet sinon de consommer la dizaine d'heures de jeu à notre allure, une bonne idée.
Finalement, la musique aurait presque plus de place dans le jeu que ce fameux don. De séquences de repos enivrantes aux disques envoyés par l'animatrice de radio locale en passant par des discussions fraternelles et même un concert, la musique est partout, entre compositions originales en partie signées par Angus & Julia Stone et classiques (mention spéciale au Thank You de Dido qui a presque réussi à nous tirer les larmes). Si vous êtes sensibles au quatrième art, c'est forcément un point en plus.
Le titre fait aussi le café sur le plan technique, encore une fois en le comparant à ses prédécesseurs et en acceptant son statut de « simple » jeu narratif. Certes un peu rigide et sujet à de rares bugs excusables, il propose des animations faciales crédibles (surtout en anglais) et une mise en scène léchée, couplées à une direction artistique à l'inspiration nord-américaine agréable et une esthétique générale qui ne cherche volontairement pas le photoréalisme.
Le passage de témoin entre Dontnod et Deck Nine est donc réussi, mais le nouveau studio n'a malheureusement pas réussi à transcender les codes de la franchise, surtout avec son gameplay très sage. Life is Strange: True Colors livre une aventure humaine et attachante, portée par le capital sympathie de Haven Springs et ses habitants. La sous-utilisation narrative et ludique du pouvoir d'Alex et des rebondissements un peu trop classiques empêche cependant cet épisode de surpasser ses prédécesseurs et d'être vraiment mémorable, malgré ses nombreux passages originaux ou touchants, son ambiance musicale réjouissante et sa copie technique très correcte.
- Une aventure plus sédentaire et humaine...
- Quelques personnages très attachants
- L'agréable omniprésence de la musique, sous toutes ses formes
- Techniquement et esthétiquement plus vibrant que les précédents volets
- ...et parfois un peu trop terre à terre
- La lecture des émotions sous-exploitée
- Les mécaniques de jeu toujours aussi sommaires