EDITO - Après la violence, la dépendance au jeu vidéo serait-elle une autre chimère journalistique ?
par La rédactionSujet récurrent dans les médias, l'addiction. Existe-t-il un rapport entre la violence, les phénomènes de dépendance aux drogues et la consommation de jeu vidéo ? Pour certains, oui, pour d'autres, non... un sujet parfait pour notre prochain "tu veux qu'on en parle ?"
L'année dernière, parler de la violence et des jeux vidéo dans notre émission "Tu veux qu'on en parle ?" avait été un choix motivé car, trop souvent, quand des évènements sordides mènent un jeune à provoquer des actions violentes, les médias relatent que l’individu en question est passionné de jeux vidéo, et souvent de jeux comme Call of Duty ou Grand Theft Auto. La relation de causalité entre jeu vidéo et violence létale n’a jamais été prouvée, mais l’argument journalistique est facilement lâché. Nous avions alors essayé au mieux de tordre le coup aux idées reçues en apportant non une vérité - il n'y en a pas - mais plutôt des pistes visant à démontrer que les jeux vidéo ne rendent pas violent.
En cherchant un sujet fort pour cette prochaine émission avec notre psychologue Jean-Paul Santoro, nous avons pensé que l'addiction aux jeux vidéo serait une voie intéressante. En effet, nombreux sont ceux qui croient que cette dépendance mènerait ainsi certains à s’affranchir des règles de la société et à n’obéir qu’à la loi de la violence, et d’autres à consommer diverses drogues. Le raccourci est rapidement fait alors entre un jeune fan de jeu vidéo et un professionnel du trafic qui passerait son temps à violenter des gens ou vendre de la drogue à des mineurs pervertis. Si cela vous parait ridicule, nous en pensons de même mais pourtant, cette relation de cause à effet est souvent pratiquée.
Pour autant, derrière ce scénario digne d'une "série Z" d'Hollywood, il est toutefois vrai que les jeux vidéo peuvent créer une dépendance. Ce phénomène d’addiction toucherait ainsi aujourd’hui selon les spécialistes près de 200 000 personnes en France. Relativisons, c'est beaucoup moins toutefois que le nombre de jeunes qui consomment du cannabis et encore moins que ceux qui ont besoin de leur dose de caféine journalière. Et les jeux comme le poker ou les machines à sous sont largement plus addictifs dans la société française que les jeux vidéo, qui ne sont d’ailleurs plus aujourd’hui l’apanage de quelques geeks mais bien un phénomène de société concernant toutes les tranches d’âge et de milieu socio-culturel ou professionnel. Les joueurs amateurs et professionnels ne sont pas plus susceptibles d’être violents que n’importe quelle personne. Ils représentent d’ailleurs une partie importante de la société. Si chaque joueur devait être violent, la France ressemblerait à un chaos sans nom.
La réalité va d'ailleurs dans le sens de ces bonnes paroles et, pour certaines personnes s’aident même des jeux vidéo pour se défaire de leur addiction au jeu d’argent, à des drogues type cannabis ou encore à l’alcool. Le potentiel violent n’existe même pas dans ces cas et la passion de ces personnes pour les jeux vidéo les aide dans leur vie au quotidien. Dans une interview pour Vice, un ancien toxicomane avoue d’ailleurs que les jeux vidéo l’ont aidé à guérir de sa dépendance à l’héroïne. Les conséquences négatives de la drogue ont disparu lorsqu’il s’est mis à jouer et à adopter une pratique qui ne rentrait ni en collusion avec sa vie professionnelle, ni avec sa vie privée ou ses relations proches. Il pouvait alors passer du temps loin des jeux vidéo sans y penser. Ce qu’il ne pouvait pas faire avec l’héroïne. Anecdotique ? Pas forcément mais certainement plus passionnant à relater qu'un mauvais préjugé à gros titre.
Quoi qu'il en soit, ce petit édito visait juste à attirer l'attention sur le sujet et ainsi à vous inviter à débattre sur notre forum. Si vous avez des questions, n'hésitez d'ailleurs pas à nous les poser et nous y essayerons d'y répondre au mieux dans notre prochaine émission qui devrait être diffusée dans la première quinzaine d'avril.