CINEMA - Ghost in the Shell : le GITS pour les nuls est beau et efficace (critique)
par Maxime ClaudelLe film Ghost in the Shell est plus réussi qu'il n'y paraît. Notre verdict.
Nous vivons dans l'époque formidable où Hollywood se permet de tout adapter. Mais, à dire vrai, nous ne savons pas pourquoi il s'est intéressé à Ghost in the Shell, monument de l'animation tiré d'un manga signé Masamune Shirow. Pourquoi maintenant ? Pourquoi tout simplement ? En somme, c'est avec un peu de réticence et beaucoup d'appréhension que nous sommes allés voir ce Ghost in the Shell signé Rupert Sanders (Blanche-Neige et le Chasseur), avec Scarlett Johansson dans le rôle-titre. Mais finalement, un divertissement efficace se cache derrière l'échec artistique que beaucoup avaient anticipé. Sans doute à juste titre de par la nature même du projet.
Le réalisateur a suffisamment stylisé son film.
Pour autant, ce Ghost in the Shell revendique suffisamment d'éléments scénaristiques différents, voire aux antipodes, pour faire grincer des dents les fans de l'original, à commencer par la bande originale à quelques sonorités près (dommage) et le personnage incarné par Scarlett Johansson (il y a une explication narrative au demeurant assez plausible, pour information). Cela étant, le film s'apparente davantage à une réinterprétation un peu naïve à la sauce blockbuster, comprenez par-là qu'elle désamorce toute la moelle philosophique de l'œuvre de base en la remplaçant par des questions existancielles de comptoir et compréhensibles par tout le monde, pour un résultat plus visuel que profond. Là où le Ghost in the Shell de 1995 se terminait sur beaucoup de questions, sa transposition live-action accouche finalement de trop de réponses. Une manière de dire que c'est du GITS pour les nuls. Ou à destination du grand public en plus poli.
Naviguant sans cesse entre la trahison et l'hommage (des nombreux plans sont retranscrits à l'identique), Ghost in the Shell parvient tout de même à assurer le spectacle, usant et abusant parfois des ralentis pour souligner l'action. Nous pourrions également lui reprocher son côté poseur, mais Rupert Sanders est beaucoup trop fier de sa vision de l'univers pour s'en passer. Il a raison puisque son film est d'une beauté assez inouïe, y compris en 3D, bien que le curseur cyberpunk pop soit trop enclenché par rapport au Tokyo désolé de son illustre ancêtre. Moins apocalyptique, plus cosmopolite.
Quant à Scarlett Johansson, l'argument de charme bankable de Ghost in the Shell, force est de reconnaître qu'elle assure en termes de performances physiques. À l'inverse, son implication émotionnelle peine à convaincre dès lors qu'elle force un peu trop le trait pour jouer le robot/objet au destin pré-établi, soit sans âme. Autour d'elle, Pilou Asbæk et l'immense Takeshi Kitano s'en tirent beaucoup mieux dans les costumes respectifs de Batou et Daisuke Aramaki.
Au final, il apparaît difficile de tirer à boulet rouge sur cette proposition signée Rupert Sanders. Alors qu'une catastrophe se profilait à l'horizon, le réalisateur a suffisamment stylisé son film pour en faire une expérience visuelle à la fois efficace et bien emballée, un objet froid à contempler. Face à l'édulcoration, les fans hardcore peuvent sans doute passer leur chemin, mais ce Ghost in the Shell ne dénote pas et ne se prend jamais pour ce qu'il n'est pas. Et c'est bien là le principal.
Note : 3 sur 5