CRITIQUE de Falcon et le Soldat de l'Hiver : une série assez convenue pour porter l'héritage de Captain America à l'écran
par Alexandre S.La 2e série du MCU propose une formule classique, mettant en scène un passage de flambeau difficile dans un contexte sociétal l'étant tout autant.
Avec la fin de la Saga de l'Infini et la mise en service de Disney+, Marvel Studios s'est lancé dans la production de séries élargissant son MCU au-delà des longs-métrages, dont la réalisation et les castings n'ont jusqu'à présent rien à leur envier. Après les neuf épisodes de WandaVision, nous avons pu découvrir Falcon et le Soldat de l'Hiver avec en vedette les personnages campés par Anthony Mackie et Sebastian Stan, comme l'indique le titre. Nous avons binge-watché les six épisodes (en VO), d'une durée de 50 minutes en moyenne, et voici à présent notre avis, garanti sans révélation majeure sur l'intrigue, mais avec tout de même quelques éléments permettant d'en comprendre les tenants et aboutissants.
Falcon et le Soldat de l'Hiver est plus là pour poser de nouvelles bases qu'autre chose.
Bien que sa narration forme un arc assez contenu qui se suffit à lui-même et où les éléments clés nécessaires à la compréhension sont remis en contexte, il nous parait évident qu'il est préférable d'avoir vu à minima la trilogie de films Captain America (surtout Le Soldat de l'hiver et Civil War) et dans une moindre mesure les derniers Avengers (Infinity War et Endgame) pour saisir toute la subtilité des évènements et motivations de chaque protagoniste. En effet, l'histoire narrée se déroule quelques mois seulement après l'Éclipse provoquée par Thanos, alors que des millions de personnes à travers le monde sont réapparues comme si rien ne s'était passé après 5 ans d'absence. Pour gérer cette population venant du monde d'avant et les conséquences de son retour, une commission internationale a été créée, le GRC (Global Repatriation Council) ou CMR en français (Conseil Mondial de Rapatriement), dont les actions ne sont pas vues d'un bon œil par tous.
À cela s'ajoute la disparition du symbole héroïque qu'était Steve Rogers, dont le sort est délibérément laissé dans le flou et sert même d'étrange « running gag », qui a confié son bouclier à Sam Wilson pour qu'il reprenne le flambeau de Captain America. Va-t-il le faire ? Eh bien, c'est tout l'enjeu de la série en réalité. Un tel fardeau n'est pas simple à porter, surtout dans un pays où les Afro-Américains sont toujours victimes de racisme, un sujet traité avec une certaine justesse en ne cherchant pas à trop en faire et qui fait malheureusement écho avec la réalité. C'est pourquoi après une entrée en scène riche en action de haute voltige servant à réintroduire Falcon dès les premières minutes de l'épisode 1, Sam décide de remettre le bouclier au gouvernement, qui en est le propriétaire ! La symbolique de cet équipement va être utilisée à plusieurs reprises au fil de la série, faisant passer des messages très clairs se passant de paroles, une jolie réussite.
L'État ne tarde d'ailleurs pas à lui trouver un nouveau propriétaire en la personne de John Walker (Wyatt Russell), un soldat émérite aux états de service impeccables que nous allons apprendre à connaître, voire à détester. Si le lore de ce nouveau venu est évidemment retravaillé pour coller au MCU, divers éléments l'entourant ont de quoi parler aux lecteurs de comics. De son côté, James Barnes est en quête de rédemption et d'un nouveau sens à donner à sa vie, alors qu'il a été gracié, un fil conducteur plus discret, mais ô combien pertinent, qui nous le fait découvrir sous un jour nouveau et plus humain.
Nos deux héros Sam et Bucky vont bon gré mal gré faire équipe, donnant lieu à quelques séquences fort savoureuses avec de l'humour à la Marvel bien dosé, une recette qui ne chamboule donc pas nos habitudes. Leur relation à tendance conflictuelle sert également à mettre en avant un personnage sur le retour dont il est difficile de ne pas faire au moins mention, le Baron Zemo. Oui, le titre qu'il arbore désormais fait toute la différence. Assez oubliable en tant qu'antagoniste dans Civil War, le personnage joué par Daniel Brühl est ici une véritable révélation, à tel point qu'il vole la vedette au duo héroïque à bien des reprises lorsqu'il est à l'écran. En revanche cette réhabilitation pour le rendre plus intéressant et proche des comics est passée par une certaine forme de retcon de ce qui a pu être dit et montré dans le long-métrage... L'une des répliques de Sam à son égard tend à prouver que même Marvel Studios en est conscient et il faudra bien faire avec. Outre ses performances scéniques, il sert surtout de vecteur à l'introduction d'une destination fictive inédite au MCU jusqu'à présent, à l'esthétique cyberpunk, que nous espérons revoir plus approfondie à l'avenir. Les décors d'Europe centrale et de l'Est nous ont eux laissés sur notre faim, n'ayant pas spécialement d'âme et se ressemblant même par moment.
Quant à l'intrigue au sens large, elle nous fait remonter la piste des Flag Smashers, le groupe de vilain de la série s'opposant au GRC et qui dispose d'aptitudes physiques hors normes, dont le nom parlera aux lecteurs de comics, mais dont le traitement a peiné à nous convaincre. Pas vraiment charismatiques et réutilisant une thématique déjà bien rongée jusqu'à l'os, ils servent surtout à faire bouger les choses, de bons faire-valoir en quelque sorte. Au moins, leur mode opératoire et idéologie font qu'ils représentent une menace bien plus intéressante que celle d'un Taskmaster dans Black Widow, pour citer l'un des plus récents antagonistes de cet univers cinématographique.
La série ne trouve son rythme qu'à partir du deuxième épisode et ne propose pas que des séquences d'action, dont les chorégraphies sont dans l'ensemble maîtrisées, mais par moment un peu brouillonnes. Ces passages plus calmes, nous pensons notamment à ceux avec Sam et Sarah, mettent surtout l'accent sur le caractère humain de nos héros, qui doivent aussi faire face aux tracas du quotidien et à la société, les rendant pour le coup plus faciles à comprendre. Notez également que les deux derniers épisodes comportent des scènes post-génériques dont raffole Marvel Studios, la première se révélant assez anecdotique au final, tandis que la seconde fait plutôt office de cliffhanger ouvrant bien des portes pour l'avenir de cet univers cinématographique, vers pourquoi pas les séries Secret Invasion et Armor Wars. L'apparition d'un certain personnage bien fantasque est aussi là pour préparer le terrain, à la manière d'un Nick Fury.
Au final, nous sentons que Falcon et le Soldat de l'Hiver est plus là pour poser de nouvelles bases qu'autre chose, redéfinissant le statu quo des personnages liés à la partie « Captain America » du MCU, Sam Wilson en tête, tout en introduisant de nouveaux acteurs sur l'échiquier. La série nous a permis d'apprécier davantage ce personnage et ses qualités humaines, lui qui jusqu'à présent faisait surtout office de sidekick, un développement nécessaire notamment en vue du futur Captain America 4. Le tout se laisse regarder et a droit à quelques fulgurances, mais ne marquera pas plus que ça les esprits.
Note : 3 étoiles sur 5
Falcon et le Soldat de l'Hiver est à visionner en exclusivité sur Disney+, dont l'abonnement coûte 8,99 € par mois ou 89,90 € à l'année.