Emma Stone incarne l'une des vilaines les plus emblématiques de Disney, dans une version plus jeune que celle de Glenn Close. Pari réussi ?
Disney file un véritable amour avec les films live-action depuis quelques années et le public est au rendez-vous. Dans la lignée de Maléfique, centré sur la grande méchante de Blanche-Neige, il nous propose désormais un autre long-métrage sur une vilaine emblématique d'un dessin animé culte, Cruella. Et sans grande surprise, il est bien difficile de livrer une origin story pour une vilaine dont le caractère trempé et unilatéral a été pensé pour un film d'animation des années 60, lui-même tiré d'un roman de la décennie précédente...
Ce Cruella aura davantage réussi à nous séduire quand il n'est pas là pour insérer un passé authentique dans l'histoire d'une extravagante tueuse de chiens.
Cruella sort ses plus grosses pinces pour essayer de dresser un portrait crédible pour cette psychopathe en devenir, tout en restant drôle et émouvant. De sa haine pour les dalmatiens à l'origine de son nom d'emprunt, en passant par sa coupe de cheveux et ses névroses, tout ce qui fait la Cruella de Vil que nous connaissons doit être expliqué ou montré, quand bien même la narration moderne avec des prises de vue réelles dénote avec les partis pris du long-métrage animé original, pensé pour les enfants.
Si Glenn Close était crédible dans le rôle de cette méchante en 1996, c'est car le côté burlesque était complètement assumé. Ici, le ton sérieux de la préquelle se perd entre l'humanisation d'une maniaque en devenir et la diabolisation d'une protagoniste brisée et forcément attachante, à tel point que le spectateur ne sait plus trop vers où orienter son compas moral. Les justifications au forceps donnent lieu à plusieurs moments un peu ridicules, entre rebondissements attendus et retournements de situation ubuesques, qui nous amènent surtout à questionner l'intérêt même du film. Que veut-il nous raconter ?
S'il ne convainc pas en temps que préquelle, Cruella n'est pas non plus à jeter pour le reste de son récit. Déjà, car son style inclassable et son déroulement difficilement prédictible lui permettent de toucher à plusieurs genres, du drame à la comédie en passant par le buddy movie et le film de braquage. L'histoire de la fillette puis de la jeune Estella nous emmène dans les coulisses d'un impitoyable monde de la mode britannique, entre désir de vengeance contre La Baronesse (l'Anna Wintour locale), happenings modesques et irrévérencieux de la jeune et revancharde passionnée de vêtements, et coups fourrés avec ses acolytes Jasper et Horace.
Et mine de rien, cette vibe originale couplée à une mise en scène rafraîchissante fait son petit effet. Le charme froid des rues anglaises couplé aux accès d'excentricité de l'héroïne campée par une Emma Stone volontaire réussissent à nous rapprocher de l'ambiance des 101 Dalmatiens, ce qui remplit déjà une partie du pari. Dommage que le côté punk, parfois amusant et remuant, soit souvent trop grossier pour être malin. Il surfe sur le succès d'Harley Quinn et consorts, sans réelle justification, ni sans être moins agaçant que peut l'être le personnage de Margot Robbie. D'autant plus que la bande-son trop présente et ponctuellement chantonnée tient plus de la coupure pub de TF1 que du véritable voyage dans le rock anglais des 70's.
Ce Cruella aura donc avantage réussir à nous séduire quand il n'est pas là pour insérer un passé authentique dans l'histoire d'une extravagante tueuse de chiens. Sa narration mêlant les genres offre un résultat divertissant sans trop de longueurs, à la fois drôle, énergique et touchant, dans des décors anglais dont la beauté austère nous replongerait presque dans l'aventure de Pongo et Perdita. Mais son ton faussement impertinent et ses ficelles scénaristiques parfois grotesques entachent ce périple qui veut malgré tout rester très consensuel.
Note : 2,5 étoiles sur 5
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