Le ratage, attendu, est arrivé sur nos écrans.
Alors, nous y voilà : l'empire Ubisoft s'étend désormais jusqu'aux confins du Septième Art. Après avoir vu Disney adapter sa licence Prince of Persia, la firme française a décidé de prendre les choses en mains en développant sa propre structure centrée sur le cinéma. Personne ne pourra lui reprocher de vouloir conserver le contrôle de ses marques et, de prime abord, l'idée est louable. Assassin's Creed apparaît donc comme un sacré pari, d'autant qu'il posera les bases pour la suite en donnant le "la" pour les prochains films (Splinter Cell, The Division). À l'arrivée, il n'échappe pas à l'habituel ratage des adaptations de jeux vidéo.
Le cul entre deux chaises.
Concrètement, Assassin's Creed se prend beaucoup trop au sérieux, arborant un ton hyper sombre m'as-tu-vu et complexifiant une intrigue pour perdre le grand public, à qui il est pourtant censé s'adresser. Souvent pompeux, le long-métrage de Justin Kurzel donne sans cesse l'impression de se chercher, entre le film pour fans empli de références évidentes comme le nez sur le visage (vous aimez les aigles ?), quitte à tomber dans l'écœurement, et le divertissement facile qui ne fonctionne jamais vraiment. La faute, d'abord, à des séquences d'action mal orchestrées et diluées dans un faux rythme.
Assassin's Creed souffre, ensuite, des mêmes maux que la franchise vidéoludique : la double narration passé/présent implique un sacrifié. Ici, c'est le passé qui trinque, ce qui est plutôt très surprenant. Dans le présent, nous assistons à de jolis discours caduques sur la lutte entre les Assassins et les Templiers, centrée sur le comeback de la Pomme d'Eden, nimbés dans le jeu de séduction entre Michael Fassbender et Marion Cotillard, paralysant davantage les maigres enjeux dramatiques. Il faut se farcir, aussi, le trip tantôt psycho de comptoir du héros et cet Animus en mode exosquelette assez bizarre, visuellement impressionnant, certes, mais pas crédible pour un sou. Une concession pour le grand public, un bras d'honneur aux fans : en bref, encore le cul entre deux chaises.
Pour ne rien arranger, grossissant les traits par des ralentis inutiles et animé par un certain penchant pour la prétention, Justin Kurzel n'étale pas l'étendue de son talent dans sa réalisation, pas aidée par une photographie ne mettant en exergue ni l'action, très illisible, ni ses décors, pourtant pièce maîtresse de la licence. Le jaune bleuâtre, ce n'est vraiment pas très joli, surtout dans les passages en basse lumière, le credo des assassins pour se faufiler. Un vrai paradoxe. Nous ne parlerons même pas de la musique, toujours hors-sujet et assommante, soulignant encore plus ce côté très nombriliste du ton général. Si Ubisoft ne voulait pas faire du Disney, il ne s'y prendrait pas autrement.
Assassin's Creed apparaît dès lors comme un grand saut sans foi dans le vide. À trop vouloir plaire à tout le monde, le blockbuster d'Ubisoft, son premier sur grand écran, ne plaît à personne. Pas vraiment aux fans, qui vociféreront sur certaines infidélités et continueront de s'émerveiller avec une manette. Encore moins aux profanes, qui ne comprendront rien à ce joyeux barnum, ni spectaculaire, ni beau à voir. Ubisoft souhaite que les joueurs forgent leur propre expérience. Les spectateurs, eux, ne sont pas prêts pour ça.
Note : 1 sur 5