MAJ RUMEUR sur Ubisoft : un rachat et une privatisation avec l'aide d'un géant chinois envisagés, qui ont déjà un impact visible
par Alexandre S.Un article de Bloomberg est venu affoler la Bourse, évoquant une possibilité bien plus complexe qu'elle n'en a l'air.
Nous ne vous apprendrons sans doute rien en disant qu'Ubisoft n'est actuellement pas au mieux de sa forme. La semaine dernière, l'éditeur français a annulé sa participation au Tokyo Game Show en dernière minute puis a reporté la date de sortie d'Assassin's Creed Shadows au 14 février 2025. Un report survenu au lendemain de l'annonce de Ghost of Yōtei, qui publiquement n'inquiète pas Yves Guillemot, et qui était apparemment espéré depuis un moment par les développeurs. Tout cela a eu lieu dans un contexte où la firme n'a cessé de chuter en bourse depuis des mois, combiné aux « mauvaises » ventes de Star Wars Outlaws. Les joueurs et autres commentateurs sur les réseaux ne donnent pas cher de sa peau à moins d'un succès de son prochain jeu. C'est dans ce cadre qu'une rumeur provenant de Bloomberg est venu secouer les marchés boursiers ce vendredi juste avant le week-end.
En effet, selon des personnes proches du dossier, les frères Guillemot propriétaires d'Ubisoft à 14,16 % (sans compter Yves Guillemot seul qui en détient 0,5670 % et les 3,559 % d'Ubisoft Entertainment) et le géant chinois Tencent, qui dispose de son côté de 9,916 % des parts, envisageraient une solution radicale déjà proposée d'une certaine manière par un autre actionnaire le mois dernier, à savoir collaborer et rendre la société privée par un rachat. Le terme « buyout » est ici bien employé, même si ce n'est pas aussi simple. Les frères Guillemot et Tencent auraient discuté de diverses options, notamment pour stabiliser la société et renforcer sa valeur boursière avec des conseillers, et ce serait l'une des possibilités, mais donc pas la seule. Évidemment, aucun porte-parole n'a voulu commenter cela.
Il n'aura toutefois pas fallu attendre avant que cette simple rumeur ait un impact. Dans la foulée de la publication de l'article, les parts d'Ubisoft ont pris plus de 33 % à la Bourse de Paris, passant de 10,77 € vers 15h45 à 14,20 € aux alentours de 17h30. C'est certes peu par rapport aux pics de ces dernières années, sauf que cela aura visiblement fait le bonheur de certains, avec un possible délit d'initié au passage...
En regardant ce que fait Tencent généralement, ce n'est pas vraiment dans ses habitudes de racheter des entreprises, mais plutôt de ratisser large en investissant un peu partout et laisser faire. De plus, suite à l'achat de 49,9 % des parts de Guillemot Brothers Ltd. par Tencent en 2022, il n'est pas possible pour ce dernier d'augmenter son capital dans Ubisoft au-delà de 9,99 % ou d'avoir un droit de veto pendant huit ans (septembre 2030) ni de revendre ses parts pendant cinq ans (2027), une manœuvre qui avait ainsi permis aux frères de conserver leur gouvernance en tant qu'actionnaires majoritaires sans craindre d'OPA hostile. Si une OPR (Offre Publique de Retrait) devait avoir lieu, il faudrait sans doute que cet accord soit revu pour que Tencent puisse racheter des parts avant une sortie de la Bourse, à moins que les frères Guillemot puissent se le permettre. Auquel cas, Ubisoft pourrait donc finir par être majoritairement détenu par la firme chinoise, qui en aurait évidemment les moyens. Et si la fratrie a l'intention de se retirer tout en récupérant un maximum de liquidité, ce serait l'occasion idéale.
Il faut tout de même se demander ce que Tencent aurait à gagner de toute cette situation. En effet, en début d'année, lorsque nous rapportions la rumeur d'une sortie d'Assassin's Creed Jade pas avant 2025 (ce qui à moins d'une surprise sera le cas), Reuters évoquait un changement de stratégie avec une réduction du développement de licences occidentales sur mobiles au profit des siennes. Donc à moins de littéralement posséder les licences d'Ubisoft suite à un rachat, le simple fait de pouvoir les utiliser ne semble plus aussi attirant.
Pour terminer, si jamais Ubisoft finit par passer sous contrôle chinois, ce serait tout de même une perte immense pour l'industrie française et un deuxième cas du genre après l'acquisition de Quantic Dream par NetEase Games en 2022. Rien ne dit également qu'une privatisation ne conduirait pas à davantage de licenciements, ce qui a déjà été le cas depuis septembre 2022 dans le cadre d'une restructuration interne.
Bref, au-delà de tout ce côté capitaliste, nous ne pouvons espérer qu'une chose, que les prochains jeux d'Ubisoft soient suffisamment qualitatifs, car c'est bien là le seul moyen pour la société de perdurer, peu importe qui en est à la tête.
Mise à jour : l'éditeur a partagé la déclaration suivante auprès d'Eurogamer :
Ubisoft a pris note des récentes spéculations de presse concernant des intérêts potentiels autour de la société. Elle réexamine régulièrement toutes ses options stratégiques dans l'intérêt de ses parties intéressées et informera le marché si et quand cela sera approprié.
La société réitère que la direction se concentre actuellement sur l'exécution de sa stratégie, centrée sur deux secteurs verticaux principaux - les aventures en monde ouvert et les expériences natives GaaS (jeux service, NDLR).
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