E3 2020 : la grand-messe du jeu vidéo bientôt transformée en un salon pour les fans et les influenceurs au détriment de la presse ?
par Alexandre S.Le salon pourrait bien changer de visage dès sa prochaine édition, de quoi faire réagir les médias.
S'il y a bien un évènement vidéoludique par excellence dans l'année où la presse du monde entier se réunit pour découvrir les futures productions, c'est l'Electronic Entertainment Expo, ou l'E3 si vous préférez. Ce rendez-vous majeur est pourtant menacé dans sa forme actuelle par l'association même qui l'organise, l'ESA (qui regroupe de nombreux éditeurs), comme l'a rapporté le site GameDaily.biz.
Depuis 2017 déjà, le salon s'est ouvert au public avec pas moins de 15 000 tickets vendus, et ce n'était visiblement qu'un début pour une transformation beaucoup plus radicale, quitte à ce que ce salon à la base professionnel devienne comme la Paris Games Week, la gamescom, et le Tokyo Game Show. Dans une présentation leakée à destination de groupes de lobbying, l'organisateur évoque ainsi sa vision de faire de l'évènement un « festival de fans, médias et influenceurs » avec une unique journée réservée à la presse, à l'industrie et... aux influenceurs, encore eux, qui serait le mardi, les deux suivantes accueillant en plus le public. Le nombre de billets vendus passerait d'ailleurs à 25 000, autant dire que le Convention Center pourrait bien manquer de place.
Le salon ferait intervenir des personnalités comme les Lakers de Los Angeles pour créer des moments « d'activation », payées pour leur présence et générer du buzz autour d'un jeu particulier, ici de basket-ball. Des « rendez-vous exclusifs réservés à certains privilégiés » pourraient être mis en place, là encore pour créer du retentissement médiatique et du « FOMO ». Qu'est-ce que cela ? Tout simplement la « peur de rater quelque chose » (Fear of missing out en anglais), le même genre de procédé que les éditeurs utilisent déjà dans les jeux de type service avec du contenu saisonnier... Des partenariats avec des médias rémunérés seraient également mis en place afin de « contrôler le contenu et le message » qu'ils véhiculent. Bon, l'exemple donné parle de l'émission Tech Impact diffusée sur CNBC, pas de quoi bondir sur son fauteuil. En revanche il semblerait que ce type de diffusion n'indique pas clairement être sponsorisée, ce qui est plutôt problématique.
Autre gros changement de prévu, le showfloor, à savoir le hall ouest du Convention Center, verrait son agencement modifié, passant de simples stands d'éditeurs à huit hubs proposant des « expériences », placés au milieu de ces derniers. Sur place, un système permettant de s'enregistrer pour jouer à une démo précise (du fast pass donc) servirait à éviter les longues heures d'attente, mais aussi de tirer parti des files d'attente pour proposer du « queuetainment », soit un moyen d'effectuer des opérations marketing auprès des personnes attendant leur tour. Les influenceurs pourraient eux endosser le rôle de bienfaiteurs sociaux, le but étant tout simplement de faire passer des messages positifs sur l'industrie et les différentes communautés.
Plus étonnant, un ticket numérique permettrait aux joueurs d'accéder aux démos du salon de chez eux pendant un temps limité à travers un portail basé sur le cloud, l'intérêt pour les éditeurs partenaires étant évidemment de récupérer des données en retour. Bien entendu, tout cela n'est encore qu'à l'étape des propositions et devra être validé avant toute mise en place, mais l'orientation de l'ESA est claire et n'a pas de quoi nous réjouir.
Au final, ce n'est pas vraiment étonnant quand un acteur majeur de l'industrie comme Electronic Arts effectue déjà ce genre d'évènement de son côté et au même moment avec l'EA Play, et que Sony Interactive Entertainment se permette de ne pas être présent à l'édition 2019. Pour autant, le transformer ainsi lui retirerait sa singularité, ce qui serait fort dommage. Qu'en pensez-vous ?