Virginia : Variable State s'est associé avec 505 Games pour lancer Virginia, un thriller qui s'oriente davantage vers le film que le jeu vidéo.
Il aura fallu plus de deux ans à Jonathan Burroughs et Terry Kenny pour développer, avec l'aide de plusieurs personnes sous le nom de Variable State, le jeu Virginia. Le titre a fait parler de lui en avançant des influences notables, comme Twin Peaks (et les œuvres de David Lynch en général), X-Files, Au-delà du réel ou encore les Giallo.
Virginia suit le parcours de deux agents du FBI, Anne Tarver et Maria Halperin, chargées d'enquêter sur la disparition du jeune Lucas Fairfax pendant l'été 1992 dans la ville de Kingdom, en Virginie. Dans une lettre des créateurs s'adressant aux joueurs, les développeurs de Variable State indiquent que « créer Virginia a été une expérience étrange et déconcertante » et espèrent qu'ils « ont donné lieu à un jeu étrange et déconcertant ». Pari clairement réussi.
LET'S PLAY - Virginia : vidéo de gameplay maison sur la démo du thriller
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Note : test réalisé sur une version PC (Windows 10 en 64 bits).
Le scénario de Virginia se calque véritablement sur celui d'un film audacieux, où les codes de la narration sont bouleversés dès le début de l'aventure. Le joueur incarne Anne Tarver, jeune agent du FBI qui vient de recevoir son fameux badge et qui part déjà sur le terrain pour retrouver Lucas, tout en étant accompagnée par sa collègue plutôt énigmatique Maria Halperin. L'histoire, la mise en scène et la narration sont au cœur de Virginia et sont réellement le seul point intéressant du jeu, qui arrive sans l'once d'un dialogue à faire suivre une péripétie globalement assez passionnante.
Virginia perd son spectateur, qui reste dubitatif devant le générique déroulant.
Dans le titre de Variable State, tout est une question d'appréhension, de compréhension et de ressenti, qui est propre à chaque joueur. Le début de l'aventure colle parfaitement aux thrillers classiques des années 90, la série Twin Peaks en tête avec son cliché de l'agent du FBI perdu dans une petite ville américaine d'où il ne comprend pas immédiatement tous les rouages. Pourtant, plus l'histoire défile sous les yeux du joueur, plus celle-ci s'obscurcit, pour laisser place à d'autres genres, le tout dans une ambiance remarquable, mais complètement (et volontairement ?) floue. La dernière demi-heure du jeu, particulièrement intense dans sa narration, laisse place à la volonté du joueur de comprendre tout ce qui vient de se passer, ce qui n'est pas forcément une bonne chose. À force de vouloir donner dans l'énigmatique, l'étrange et le déconcertant, Virginia perd finalement son spectateur, qui reste dubitatif (mais pas moins impressionné) devant le générique déroulant.
Spectateur, le joueur l'est véritablement dans Virginia tant l'absence de gameplay est frappante. Si certains aiment casser du sucre sur le dos de David Cage (Fahrenheit, Heavy Rain, Beyond: Two Souls), que dire de la création de Variable State ? La limite entre le jeu vidéo et le long-métrage a rarement été aussi trouble, le joueur ne pouvant qu'avancer à un rythme très lent dans des environnements linéaires et cloisonnés et appuyer de temps en temps sur la touche d'action pour faire progresser l'intrigue. Aucun choix, aucune liberté, aucune place à l'exploration ou encore à la recherche d'indices, tout est fait pour que le joueur avance inexorablement vers la fin de l'aventure sans embûches. Ce qui fait de Virginia une œuvre résolument cinématographique, comme le laisse présager dès le lancement du jeu le générique semblable à celui d'un long-métrage. La longueur n'est d'ailleurs pas le maître mot du titre de Variable State, celui-ci se pliant aussi vite que le visionnage de deux épisodes de Twin Peaks, soit en une heure et demie seulement. Le sentiment de passivité devant Virginia est des plus agaçants, même si la volonté d'en apprendre davantage sur l'intrigue fait persister le joueur, qui le termine donc en une seule session de jeu.
Virginia s'amuse également à dérouter grâce à son atmosphère visuelle, les graphismes donnant ici dans le minimaliste avec un style rappelant celui de Firewatch. Les couleurs sont vives, les textures sont simples et ne donnent pas dans la fioriture de détails, mais dans l'ensemble, le jeu de Variable State sait se dénoter par des effets de lumières saisissants, notamment lors de certaines séquences particulièrement intenses. Pour autant, il n'échappe pas à quelques soucis techniques, dont des problèmes de collisions entre certains objets ou des éclairages clignotants qui gâchent un peu l'immersion, rappelant qu'il s'agit là d'un jeu vidéo avant tout. Par contre, là où Virginia met tout le monde d'accord, c'est grâce à ses musiques composées par Lyndon Holland, interprétées par l’Orchestre philharmonique de Prague et enregistrées, cela tombe bien, dans le studio Smecky qui a déjà servi pour les films Lost Highway et Mulholland Drive de David Lynch. Les différentes pistes audio oscillent entre le mélancolique et l'épique, collant à chaque fois parfaitement à la situation et accompagnant le joueur dans cette plongée étrange qu'est le déroulement du jeu. Mention spéciale à la scène du bar, où Anne Tarver se pose devant un concert acoustique à l'instrumental rappelant les compositions d'Angelo Badalamenti. Au moins, personne n'est dérangé par un quelconque doublage de mauvaise qualité, car Virginia ne comporte pas le moindre dialogue, tandis que les bruitages se tiennent en retrait.
Alors, que pensez de Virginia ? L'intention de Variable State est claire, proposer « un jeu étrange et déconcertant », ce qu'est finalement le titre. Le scénario tient globalement la route, malgré un final bien trop alambiqué, mais Virginia est avant tout un jeu vidéo et non un film d'animation, ce que semble oublier le gameplay, épuré à son paroxysme. Cette absence de gameplay laisse un arrière-goût d'envie à la fin de l'aventure, difficile donc de conseiller de se lancer corps et âme dans ce « jeu » qui n'en est finalement pas un. Pour autant, les amateurs d'expériences originales et d'ambiance déroutante peuvent être séduits par Virginia, car malgré ses nombreux défauts, il n'en conserve pas moins autant de qualités.
- Une ambiance très prenante
- Quelques moments intenses
- Les graphismes agréables au premier abord
- Les musiques de Lyndon Holland
- Durée de vie très faible
- Techniquement perfectible
- Aucun gameplay
- La fin du scénario alambiquée