Assassin's Creed Valhalla : Eivor est venue jouer le messie sur les terres de Francie, ajoutant un nouvel arc à sa déjà bien longue saga.
On en a gros, Charles !
Par le passé, les extensions des jeux Assassin's Creed avaient ce côté excitant pour les fans du fait qu'elles étendaient bien souvent le lore de la lutte entre Assassins et Templiers au sens large, mettaient au premier plan des Fragments d'Eden et les Isus, voire faisaient même avancer la trame narrative du présent dans le cas d'Odyssey. Ce ne fut malheureusement pas le cas de La colère des druides, le premier DLC d'Assassin's Creed Valhalla se déroulant en Irlande du Nord, et ne comptez hélas pas non plus sur Le Siège de Paris de ce côté. Eh oui, Ubisoft a une fois de plus brouillé les lignes en permettant de profiter de ce contenu à n'importe quel moment une fois l'un des premiers arcs d'Angleterre complétés. Forcément, cela impacte négativement la trame en ne faisant toujours pas évoluer Eivor (malgré certains moments appréciables) et en restant très vague sur le contexte historique, les évènements réels étant censés se dérouler après ceux dépeints dans le jeu de base. En revanche, la Puissance des ennemis est cette fois fixée à 200 au minimum et évolue ensuite en fonction de la nôtre. Ces détails mis de côté, est-ce que cette nouvelle aventure vaut le détour ? Eh bien... c'est une toile aussi contrastée que les paysages traversés qui s'offre à nous.
Le Siège de Paris n'en a que le nom.
Développé par Ubisoft Singapour, Le Siège de Paris fait donc voyager Eivor en Francie, pour une raison qui peut paraître assez tirée par les cheveux, tout du moins bien accommodante. Une certaine Toka du clan Elgring vient ainsi quérir notre aide pour combattre les Francs, mettant sur la table l'argument de la sécurité de Ravensthorpe. Sauf qu'à l'époque réelle des évènements de ce siège, vers 885 EC, Eivor devrait avoir bien plus à craindre de la reconquête d'Ælfred que d'un souverain fou se trouvant outre-Manche… Ce raisonnement étant évoqué à de multiples reprises, il y a de quoi être agacé. Point de vue viking oblige, les Francs sont dès le départ dépeints négativement, ce qui nous ferait presque oublier qu'ils sont chez eux et défendent leur patrie face à l'envahisseur, un point qui saute forcément davantage aux yeux dans le cas présent que dans le jeu de base, puisqu'il s'agit de notre pays. Heureusement que la narration insiste tout de même sur la quête de vengeance aveugle de Sigfred, à la tête du clan, et n'hésite pas à faire emprunter à Eivor la voie de la diplomatie plutôt que du massacre à tour de bras, certains choix étant laissés à notre discrétion.
Au fil des quelques heures de scénario proposé, nous croisons tout un panel de personnages plutôt bien travaillés, ayant une forte identité et loin d'être unidimensionnels. En tête de liste, le roi Charles III dit « Le Gros », qui en impose réellement à l'écran et dont la folie fait froid dans le dos. En contraste direct avec ce souverain, nous trouvons son épouse Richardis, pieuse à l'extrême, ou encore le comte Eudes, qui a lui la tête bien sur les épaules et dégage une grande classe. En revanche, pas de trace de Rollo, pouvant faire partie de notre équipage évidemment, et qui historiquement est l'un des leaders du fameux siège, la base de données parlant justement de sa « spectaculaire réussite en Francie » ... D'ailleurs, cet évènement se voulant au cœur du DLC a de quoi en décevoir plus d'un.
En effet, Le Siège de Paris n'en a que le nom. Après sa préparation, et au moment où il est lancé, les séquences s'enchaînent sans donner l'impression d'une longue prise de position autour de l'Île de la Cité, laissant place à l'action derrière les murs, ce qui est bien décevant. De même, le faible nombre de PNJ s'affrontant ensuite dans les rues est ridicule, bien loin des assauts présents dans le jeu principal et qui nous immergeaient dans d'épiques batailles. Pour autant, toute la séquence l'entourant est appréciable, mais nous en attendions bien plus. Et malheureusement, une fois ce passage effectué, il nous est impossible de retourner sur l'île pour une simple balade (un « glitch » est présent, mais la zone n'a pas été prévue pour), rien d'important ne s'y trouvant de toute manière. Il est loin le temps des Séquences rejouables... Comptez sinon un peu moins de dix heures pour venir à bout de la quête principale si vous vous concentrez dessus et selon votre rythme, qui propose une narration allant dans l'ensemble droit au but.
La Francie, une boîte noire à l'ambiance sombre
Tout comme pour l'Irlande, ce voyage en Francie est donc l'occasion d'arpenter de nouvelles terres, qui ne dépaysent pas énormément de l'Angleterre, mais dont l'ambiance est par endroit glaçante, bien aidé par la bande-son de Stephanie Economou qui nous plonge pleinement dans cette atmosphère par moment vraiment malsaine. Entre les habitations en partie détruites, les sols ravagés et les trop nombreux cadavres pendus, brûlés ou entassés dans des fosses, ça ne respire pas trop la joie de vivre dans certaines parties de la carte. La peste n'y est pas étrangère, tout comme les exactions d'un groupe de fanatiques qui va se mettre sur la route d'Eivor, les Bellatores Dei.
Le retour des missions de type Black Box, un concept qu'il faudrait systématiquement reprendre et améliorer à l'avenir.
Et là, nous vous arrêtons tout de suite, il ne s'agit malheureusement pas d'un équivalent à l'Ordre des Anciens ou aux Enfants de Danu. Pour autant, les quelques représentants que nous devons assassiner ont bénéficié d'un soin particulier dans leur mise en scène, même si nous aurions apprécié en savoir davantage sur cette mystérieuse organisation (et ce n'est pas le seul élément resté sans réponse). Ces séquences de mise à mort sont d'ailleurs plus travaillées que dans le reste du jeu, puisqu'elles marquent le retour des missions de type Black Box, comprendre par là qu'il nous est donné des opportunités pour atteindre notre cible de façon discrète et avec une liste d'objectifs facultatifs nous y aidant, qui sont en partie scriptés, jouant bien avec le level design. Ce concept avait été introduit dans Assassin's Creed Unity et il était grand temps qu'Ubisoft se décide à le réutiliser, même si ces missions sont en petit nombre. D'ailleurs, les phases d'investigations font parfois usage du Charisme et même de notre apparence via l'équipement. De plus, malgré le manque de corridor de la mémoire, les cinématiques liées à ces assassinats uniques renforcent l'immersion. Clairement, si tous ces éléments peuvent être systématiquement repris et améliorés à l'avenir, la licence ne s'en portera que mieux.
Pour autant, il n'est hélas que très peu fait mention de Ceux qu'on ne voit pas, avec un simple Bureau comme ceux en Angleterre, celui-ci ayant la particularité qu'il faille en ouvrir l'accès en récupérant au préalable des clés dans des ruines romaines, le tout pour une récompense bien dérisoire. Même le très bon easter egg / mystère en lien avec le DLC Dead Kings ne parvient pas à faire passer la pilule de ce manque de contenu lié aux Assassins alors que l'occasion s'y prêtait.
Du reste, la carte de la Francie se décompose en quatre régions (Melunois, Évresin, Amiénois et Paris) pour une superficie totale bien moindre que celle de l'Irlande, surtout que le monde est évidemment distordu par rapport à la réalité. L'avantage, c'est que les déplacements en sont facilités. Nous y retrouvons des noms bien connus tels que notre hub de Melun, Paris évidemment, qui s'étend des deux côtés de la Sequana (Seine) avec ses quartiers pauvres d'un côté et ses belles demeures protégées par des murs de l'autre, Amiens ou encore Chartres, même s'il est bien difficile de s'y projeter puisqu'elles n'ont pas grand-chose en commun avec nos villes actuelles, voire rien du tout. Forêts, marais, vignes et autres champs de fleurs colorées viennent compléter ce tableau finalement assez diversifié, mais qui ne donne pas spécialement envie de s'y attarder.
A Plague Tale: Rebellion
Ce qui fait le plus défaut à ce nouveau petit monde ouvert, c'est le manque d'activités annexes à y effectuer. Des collectibles y sont bien évidemment disséminés, quelques cairns d'une étonnante facilité sont aussi présents et nous retrouvons toute la panoplie d'objectifs habituels en petite quantité afin de compléter chaque région. Seuls deux Raids nous demandent de mettre à sac tout autant de lieux bien pensés pour l'activité (ils ne servent qu'à ça après tout) et il faut bien avouer que le besoin d'utiliser notre longship ne s'est pas fait sentir. Sinon, une bête légendaire et un triplé de nobles francs un brin déjantés font office de boss secondaires. Même en ayant une Puissance bien supérieure à la nôtre, ils n'opposent pas grande résistance à Eivor sans même utiliser les plus puissantes armes du jeu, leurs patterns étant très classiques.
Les missions de Rébellion ne servent dans l'absolu à rien.
Comme nouveauté basée sur un peu le même principe que les Comptoirs de La colère des druides, nous avons droit aux missions de Rébellion gérées par Pierre ou ses alliés à travers la Francie. Le principe est simple, nous avons le choix entre différentes quêtes nous demandant d'éliminer un ou plusieurs ennemis, voire de récupérer un document, certaines pouvant être réalisées seul quand les autres nous attribuent un groupe de rebelles soit spécialisé dans le corps à corps ou l'affrontement à distance, selon notre bon vouloir. Chaque mission réussie augmente notre rang d'Infamie, son maximum étant de 4, et nous fait gagner des Deniers, une monnaie nécessaire pour acheter des améliorations pour nos troupes (superficielles), l'un des deux nouveaux sets d'équipement bloqué derrière cette activité, quelques éléments cosmétiques et runes, puis des ressources lorsque tout a été récupéré. Le souci, c'est que cela ne sert dans l'absolu à rien, aucun réel enjeu scénaristique n'y étant associé. Ajoutez à cela une redondance folle qui arrive très rapidement et le fait d'obliger à des allers-retours incessants pour rendre compte de nos résultats à un PNJ et vous comprendrez qu'il n'y a rien de bien intéressant à en tirer.
L'autre ajout, qui impacte cette fois directement certaines phases de gameplay, c'est la présence de nuées de rats, notamment dans les souterrains. Si l'idée est bonne sur le papier et reprend à bien moindre échelle le danger au cœur de A Plague Tale: Innocence (difficile de ne pas y penser), son exécution est en revanche loin de nous convaincre. Les situations où ils peuvent être utilisés pour tuer les gardes en restant à couvert sont peu nombreuses et le reste du temps, ils ne sont qu'une gêne faisant perdre du temps, sans réellement nous inquiéter. Car, oui, s'ils nous attaquent trop longtemps, Eivor finit par mourir, il est donc nécessaire d'agiter notre arme sous leur museau pour qu'ils partent se cacher un temps dans les grilles prévues à cet effet. Au moins, Ubisoft Singapour a tenté d'apporter un peu de nouveauté, car il faut bien avouer que les mécaniques d'exploration sont désormais rincées jusqu'à plus soif, comme devoir faire sauter des murs à l'aide de jarres d'huile.
Soli Deo gloria
Avant de conclure, parlons des quelques autres ajouts de ce DLC. Pour commencer, des cavaliers francs (légers et lourds) ne pouvant pas tomber de selle sont présents et par moment bien ennuyants, même si ce sont surtout les arbalétriers qui nous ont tapés sur les nerfs. Pour en venir à bout, nous pouvons compter sur trois Aptitudes inédites : la Flamme dorée qui colle une bombe sur un ennemi et le pousse ensuite vers ses petits camarades en s'y prenant bien (notre préférée), l'Haleine de goule infligeant une maladie en décochant une flèche (autant utiliser du poison ou du feu) et une dernière également à l'arc pour attirer des rats sur notre cible, rendant encore plus obsolète la mécanique environnementale décrite plus haut.
La volonté d'un retour aux sources est présente.
Des faux font leur apparition, au nombre de quatre et au maniement assez lourd, que nous aurions aimé voir dans notre dos en ayant notre capuchon visible pour jouer au fossoyer... ainsi que plusieurs épées courtes, classe d'armes ayant été introduite avec la dernière mise à jour gratuite et qui est un régal à manier, surtout avec deux équipées à la fois. La voix de Randvi a elle été changée en anglais pour ce DLC, visiblement en raison d'un problème d'agenda, ce qui est un peu perturbant, et nous avons noté quelques ralentissements, mais aucun bug gênant n'est venu nous contrarier. Enfin, notez que nous avons passé un peu plus de 25h pour compléter à 100 % le contenu disponible, bien trop d'heures ayant été consacrées aux missions de Rébellion. Reda étant en Francie, il est toujours possible de retourner s'y amuser quotidiennement pour faire le plein d'opales.
Avec Le Siège de Paris, c'est donc cette fois la case du DLC purement historique qui est cochée, malgré un peu trop de libertés prises et des enjeux passés au forcing pour justifier la présence d'Eivor en Francie. Nous avons apprécié ce voyage, mais une fois de plus, l'absence d'implication des Assassins et d'un quelconque but nécessitant de revivre ces mémoires n'aide pas à donner de l'impact aux évènements, qui font encore une fois office de bon filler, sans plus. Pour autant, la volonté d'un retour aux sources est présente avec les missions Black Box, comme si Ubisoft tâtait le terrain en vue du prochain épisode. Puisque le suivi du jeu va se poursuivre avec davantage d'extensions au cours d'une Année 2, nous ne pouvons qu'espérer que les prochaines aient au moins un lien avec la trame principale d'Assassin's Creed Valhalla, quitte à ce que seule la mythologie Isu soit concernée.
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- Un récit sombre et torturé qui fonctionne…
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- Le retour des missions Black Box avec des assassinats uniques
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- … mais qui n'apporte rien de plus à l'histoire d'Eivor
- Il est où le « Siège » ?
- Les rats, pas exploités correctement
- Les missions de Rébellion, inutiles et redondantes