Nous avons assisté à une avant-première en VOSTFR de ce 29e film du MCU, qui va indéniablement diviser le public.
La divine comédie
Difficile de dire vers quoi se dirige réellement le Marvel Cinematic Universe avec sa Phase 4 qui part dans toutes les directions en multipliant les personnages, traitant les conséquences d'Endgame et ayant ouvert les vannes de son multivers, notamment dans l'encore récent Doctor Strange in the Multiverse of Madness avec certaines pistes potentiellement très intéressantes. N'espérez pas avoir davantage de réponses de ce côté en allant voir Thor: Love and Thunder, qui fait son petit bonhomme de chemin dans sa bulle cosmique et asgardienne. Avant de rentrer dans le vif du sujet, évidemment sans spoiler, si vous n'êtes pas particulièrement client de l'humour de Taika Waititi et espériez une œuvre un peu plus sérieuse, évitez de vous faire des nœuds au cerveau et passez votre chemin, car Thor: Love and Thunder est une comédie dramatique dans la lignée de Ragnarok. En ce qui nous concerne, nous avons bien plus apprécié ce 4e volet, notamment en raison de ses thématiques.
Le réalisateur prend en tout cas un malin plaisir à s'amuser avec Thor.
En guise d'introduction, nous avons droit à une mise en place efficace de l'antagoniste de ce film permettant en quelques minutes de connaître ses motivations. Il est chauve, a le teint pâle et va rapidement vouloir exterminer toutes les divinités de l'univers... non, ce n'est pas Kratos, mais Gorr, le Massacreur de dieux. Bien que son apparence ne soit pas tout à fait comic accurate, ce Voldermort de l'espace campé par un Christian Bale quasi méconnaissable nous a fait forte impression. Déjà, sa quête personnelle a du sens et ouvre le débat sur le rôle des dieux dans le MCU. De plus, l'acteur crève l'écran en étant aussi bien glaçant qu'amusant à sa manière. Dommage que son surnom n'ait pas aussi bien été mis à exécution, car les actions violentes du « boucher » ont lieu hors champ, simplement évoquées avant qu'il finisse par s'en prendre à Thor. Autre détail qui a de quoi nous laisser circonspect, son objectif passe par l'introduction en bonne et due forme d'un véritable deus ex machina dont nous ne savons au final pas grand-chose. Certes, voir ce genre d'élément du lore des comics porté à l'écran fait plaisir, mais il aurait mérité une explication plus poussée et sans doute une utilisation dans le cadre d'un enjeu plus « sérieux ».
À plusieurs reprises, Taika Waititi se sert de Korg comme narrateur pour résumer en un instant ce qu'il s'est passé dans la vie d'un personnage, un procédé qui se justifie d'autant plus que le réalisateur incarne le Kronien à l'écran. Ce côté très meta est renforcé par le fait qu'il raconte ça au coin du feu à un groupe d'enfants comme vu dans l'une des bandes-annonces, et donc toute l'histoire du film. Qui peut alors dire si tout ce que nous voyons est véridique (de manière intradiégétique évidemment) ou enjolivé pour rendre le tout plus exaltant auprès de son audience ? Ce qui est sûr, c'est que ce compagnon d'aventure de Thor est avant tout là pour l'humour et pas grand-chose d'autre.
Le dieu du tonnerre est donc réintroduit aux côtés des Gardiens de la Galaxie, dont la présence relève plus de l'ordre du caméo qu'autre chose, faisant simplement acte de présence au début du long-métrage en assurant la transition entre la fin d'Endgame et cette nouvelle aventure, visiblement bien satisfaits d'enfin se débarrasser de ce passager leur volant la vedette tellement il survole le danger sur le champ de bataille, du moins c'est ainsi que nous l'avons ressenti. Le réalisateur prend en tout cas un malin plaisir à s'amuser avec Thor en proposant des scènes d'action bien badass (ou en le mettant à poil) et un développement du personnage de Chris Hemsworth nous livrant une version portée sur le burlesque alors qu'il était devenu plus sérieux dans Ragnarok, avant de sombrer dans la dépression. Une régression ? Pas vraiment, car cet humour sert à cacher ses traumatismes alors qu'il cherche une nouvelle raison de vivre. Son statut à la fin du film ouvre par ailleurs d'intéressantes perspectives et nous a vraiment plu par sa portée symbolique, le dénouement opérant un bon contrepied que nous n'avons pas vu venir.
What is Love ♫
Avec un tel titre, Thor: Love and Thunder a évidemment comme thème central l'amour, qui est traité de diverses manières, avec en premier lieu la relation entre le fils d'Odin et Jane Foster. Natalie Portman fait donc son retour en ne se contentant plus d'être la petite amie scientifique de service et prend une tout autre dimension, et du muscle, en incarnant The Mighty Thor et maniant Mjöllnir. Si vous avez lu les comics, la manière dont elle est réintroduite dans l'intrigue ne vous surprendra pas, même si une certaine légèreté est de mise pour ne pas trop plomber l'ambiance, avec au passage un parallèle bien trouvé qui se dessine entre elle et Gorr. Son traitement passe par plusieurs scènes iconiques en costume où elle gère brillamment la situation, sans toutefois forcer sur le côté « girl power », et une amitié naissante avec Valkyrie, toujours incarnée par Tessa Thompson, proposant une bonne dynamique. Le roi de la ville de New Asgard, qui est devenue un véritable piège à touristes, a aussi droit à de rares moments d'éclat à l'écran, même si son rôle est plus en retrait par rapport à Ragnarok.
Thor: Love and Thunder se révèle être un très bon divertissement pour petits et grands.
Sans trop en dire, l'amour est un thème qui concerne également les armes des protagonistes, Mjöllnir et Stormbreaker, avec des scènes totalement burlesques et saugrenues, servant même de justification à la direction que prend l'intrigue. Ça ne plaira pas forcément, mais couplé à certains plans de caméra, cela donne des situations bien marrantes. Nous pouvons en dire autant des deux boucs (ou chèvres ?) Tanngrisnir et Tanngnjóstr, qui méritaient effectivement leur affiche et ont bien fait rire la salle.
En termes de rythme, le visionnage de Thor: Love and Thunder passe à une vitesse folle sans nous laisser le temps de nous ennuyer avec sa durée de 1h59. Le souci, c'est que l'enchaînement est par moment un peu décousu ou trop rapide, avec des scènes dont nous sentons les coupes au montage et quelques manques d'explication. Pour le coup, la partie à Omnipotent City (ce que nous pensions à tort être l'Olympe) est sans doute un peu trop longue par rapport à son importance réelle, mais il fallait bien mettre en avant le Zeus de Russell Crowe. Les décors grandiloquents et luxueux de cet environnement tiré des comics contrastent par ailleurs parfaitement avec le passage quasi entièrement en noir et blanc sur une sorte de lune désertique, qui est une idée de mise en scène franchement bien trouvée et cohérente.
Le film est de toute manière très beau et coloré dans l'ensemble, à quelques exceptions près comme sur les effets visuels du casque de Thor, mais pas toujours super lisible dans ses scènes d'action. Certaines sont floues en raison de la vitesse d'exécution (ou alors c'est notre myopie...) et d'autres pas franchement aidées par les créatures ombrales nées de la Nécrolame de Gorr. Enfin, du côté de la bande-son, l'ambiance est évidemment très metal et rock'n roll des années 80 avec notamment l'utilisation de plusieurs tubes du groupe Guns N' Roses, un choix très judicieux.
Thor: Love and Thunder se révèle être un très bon divertissement pour petits et grands, abordant certaines thématiques graves sous le prisme d'un humour bon enfant, proposant un méchant convaincant et un final surprenant. Si vous recherchez une comédie sans prise de tête, vous devriez donc y trouver votre bonheur, bien que le film aurait profité d'un montage plus long pour mieux gérer son rythme. Enfin, et ça n'a rien d'une surprise, « Thor reviendra » bien dans le MCU à l'avenir, deux pistes s'offrant à nous dans tout autant de scènes post-génériques, la première au milieu des crédits introduisant encore une fois un personnage dont il nous tarde de découvrir le traitement.
Note : 3,5 étoiles sur 5