Les Tortues Ninja reviennent pour une nouvelle aventure au cinéma, plus sale et sombre que jamais. Elle reste néanmoins calibrée pour tous les publics, avec tous les défauts que cela implique.
Plus habituée aux séries et aux films live-action, la licence Teenage Mutant Ninja Turtles n'avait pas encore son film d'animation de référence. TMNT : Les tortues ninja et ses images de synthèse sont trop ancrés dans leur époque, et ni Batman et les Tortues Ninja ni Le Destin des Tortues Ninja, le film n'avaient vocation à toucher un large public. Les espoirs étaient donc grands autour de Ninja Turtles: Teenage Years, ou Teenage Mutant Ninja Turtles: Mutant Mayhem en anglais, une collaboration entre les réalisateurs Jeff Rowe et Kyler Spears et les producteurs Paramount Animation, Nickelodeon et Point Grey Pictures (société de Seth Rogen et Evan Goldberg) à destination du cinéma.
Difficile de résister à ce Ninja Turtles: Teenage Years, tant il ressemble à pas grand-chose de ce qu'a pu proposer le cinéma d'animation par le passé.
Ninja Turtles: Teenage Years revient comme son nom l'indique sur l'adolescence de Leonardo, Raphael, Michelangelo et Donatello, tortues adoptées par ce bon vieux rat protecteur de Splinter alors que tout ce beau monde a été exposé à un étrange fluide vert anthropomorphisant. Déconseillés de s'approcher des humains par leur paternel craintif et élevés au kung-fu pour se défendre face aux menaces du monde extérieur, ils vont forcément vouloir s'émanciper lorsqu'ils vont croiser la route de la lycéenne et apprentie journaliste maladroite April O'Neal. Elle va ainsi les aider à arrêter la mouche mutante Superfly, dans le seul but de gagner en capital sympathie auprès des New-Yorkais et tenter de vivre une vie d'ado comme les autres.
Ce récit initiatique comme nous en avons vu tellement d'autres restera assez classique et mettra d'ailleurs du temps à « décoller » sans jamais vraiment atteindre un niveau d'intensité exaltant. Nous avons là un spectacle familial avec certes un méchant aux revendications radicales, mais surtout une morale grand public, sans réellement d'enjeux ou d'éléments de scénario aussi sombres que l'esthétique graveleuse le laissait présager. Les nombreux mutants rejetés par la société resteront davantage en mémoire que l'histoire qui les lie, que ce soit par leurs motivations, leur personnalité barrée ou leur apparence de gueule cassée.
Car oui, là où Ninja Turtles: Teenage Years arrive vraiment à tirer son épingle du jeu, c'est grâce à son univers morose et sale, à l'image des égouts où évoluent régulièrement les tortues parias. Que ce soit à travers ses personnages aux visages asymétriques et parfois perturbants, ses décors aux lignes brisées et ses effets visuels volontairement brouillons, comme encore à l'état d'esquisse, il dégage une atmosphère unique, à la fois inconfortable et si agréable à contempler. La bande originale de Trent Reznor et Atticus Ross s'inscrit dans cette lignée, avec des morceaux électroniques parfois énergiques, parfois perturbants, qui se font malheureusement trop peu remarquer. Même l'utilisation du classique What's Up de 4 Non Blondes en version dance lors d'une séquence d'action tombe un peu à plat, mise en retrait avant même d'avoir emporté le spectateur.
Cette ambiance couplée aux techniques d'animation modernes et à de nombreuses idées de mise en scène, notamment lors de certains combats faisant honneur aux films d'arts martiaux, donnent lieu à de beaux moments graphiques. Ces passages réjouissants côtoient cependant des moments plus bateau, comme une course-poursuite en voiture et un combat final qui aurait gagné à proposer des plans plus marquants. L'humour étant aussi une composante importante de la franchise, il y en a à revendre dans cette version, que ce soit via des gags visuels pour les plus jeunes ou des vannes efficaces pour les plus grands. Il y a cependant quelques blagues un peu plus crades qui rappellent que Seth Rogen et Evan Goldberg ont leur mot à dire là-dedans, et des jeux de mots risibles qui auraient presque pu être évités, mais qui sont peut-être propres à la version française.
D'ailleurs, cette VF est plutôt sympathique, quoi qu'un peu lisse du côté des tortues, souvent cantonnées à leur rôle de leader fayot, amuseur de galerie, bagarreur et nerd de service. Gérard Darmon et Fianso sont très bons en Splinter et Superfly, mais difficile de penser à autre chose que ce que cela donne avec Jackie Chan et Ice Cube aux manettes en anglais. Il en va de même pour les vannes adaptées, les références francisées ou certaines blagues qui passent à côté de leur cible, toutes potentiellement encore plus drôles en VO. Mention spéciale cependant à Jérôme Niel, parfait en Mondo Gecko, lézard le plus cool de New York qui vole la vedette aux autres mutants secondaires, y compris les très en retrait Bebop et Rocksteady.
Difficile de résister à ce Ninja Turtles: Teenage Years, tant il ressemble à pas grand-chose de ce qu'a pu proposer le cinéma d'animation par le passé. Visuellement crasseux, parfois presque un peu trop pour le plus jeune public, il nous offre une vision unique du New York des Tortues Ninja, héros en devenir et en perte de repères au cœur d'un récit aux ficelles attendues, mais forcément efficaces, bien aidé par un casting de personnages aussi attachants que repoussants. Sa brièveté, son intensité et son ton comique ne permettent dans tous les cas pas de s'ennuyer, même si nous aurions aimé avoir encore plus de grands moments à retenir avant la suite, déjà confirmée par les producteurs et teasée lors de la scène post-crédit.
Note : 3 étoiles sur 5
Ninja Turtles: Teenage Years sort le 9 août au cinéma en France. L'artbook officiel du film est disponible à partir de 37,90 € sur Amazon.fr.