La poupée culte créée par Ruth Handler débarque en salles, sur fond d'humour et de critiques sociétales bien senties.
À l'annonce d'un long-métrage live-action Barbie, nous avions de quoi être intrigué tant la poupée de Mattel est ancrée dans la culture populaire et connue de tous, ayant de surcroit bénéficié d'une multitude d'adaptations animées depuis le début des années 2000. Déjà bien convaincu par le ton des bandes-annonces, nous avons donc décidé de nous rendre à une avant-première en VOSTFR de ce film distribué par Warner Bros. Pictures et réalisé par Greta Gerwig, qui a également co-écrit le scénario avec son époux Noah Baumbach. Une petite bombe en vue ? Cette comédie grand public ne nous a certainement pas laissé indifférent !
Un bon divertissement feelgood délivrant des messages forts par le biais d'un humour satirique décapant.
Les premières minutes de Barbie donnent immédiatement le ton en introduisant une narratrice (Helen Mirren) nous expliquant dans les grandes lignes les origines du personnage et son monde idyllique qu'est Barbie Land avec une mise en scène qui prête d'emblée à sourire. En effet, bien que s'appuyant sur la véritable genèse de la poupée, Greta Gerwig a ici ajouté une composante fantaisiste au service des messages qu'elle a voulu délivrer, jouant sur notre suspension consentie de l'incrédulité. Comprenez par là qu'il faut juste accepter ce fait sans chercher à se faire de nœud au cerveau, surtout lorsqu'il s'agit du passage entre les deux réalités et de tout ce qui concerne les produits Mattel. Tout est parfait à Barbie Land, du moins pour les Barbie qui occupent toutes les fonctions importantes et pensent que les petites filles sont heureuses grâce à elles, dont chaque journée est idéale du lever au coucher du soleil. Outre la profusion de rose et couleurs acidulées, l'originalité de ce monde est qu'il est basé sur les jouets de la marque, à commencer par la Maison de rêve de Barbie. Le souci du détail est remarquable en termes de direction artistique, de quoi ravir les connaisseurs.
Nous suivons donc la Barbie Stéréotypée incarnée par la plantureuse Margot Robbie, qui côtoie au quotidien une pléthore d'autres Barbie telle que la présidente (Issa Rae) ou une prix Nobel de physique (Emma Mackey), une Midge (Emerald Fennell) et un Allan (Michael Cera), mais aussi de multiples Ken (Kingsley Ben-Adir, Ncuti Gatwa), dont celui du beau gosse Ryan Gosling qui « plage » (le jeu de mots en anglais avec le terme « beach » signifiant également « échouer » apparaît comme parfaitement volontaire). Malgré son physique avantageux, il n'est que le bon copain se faisant friendzoner alors qu'il est transi d'elle et nourrit une amusante rivalité avec le Ken de Simu Liu. Cette vie fantastique tout en plastique va toutefois être bouleversée à la suite d'une soirée dansante, alors qu'une pensée morbide traverse l'esprit de Barbie. Le lendemain, elle se réveille ainsi décoiffée, l'eau de sa douche n'est pas à la bonne température (notez qu'aucun liquide n'en sort, renforçant l'aspect jouet), elle chute violemment au lieu de flotter en l'air et, comble de la malchance, a désormais les pieds plats et la cellulite ! Elle se résout donc à aller consulter l'excentrique Barbie Bizarre de Kate McKinnon, que nous avons adorée, qui représente les poupées maltraitées par leur propriétaire. Sans spoiler, cette dernière va lui expliquer qu'elle doit se rendre dans le Monde réel si elle souhaite que tout rentre dans l'ordre, avec au passage une référence à Matrix bien sentie et c'est loin d'être le seul clin d'œil au portfolio de Warner Bros. Discovery, certains étant particulièrement incisifs.
C'est donc dans un premier temps un isekai inversé qui nous est proposé, avec Ken suivant Barbie dans cette réalité assez folle qu'est la nôtre où les hommes ont le pouvoir. Nous n'en dirons pas plus sur le reste de la trame qui se déroule efficacement et sans temps mort durant 1h54, mais il est impossible de ne pas parler de l'un des thèmes majeurs du long-métrage qu'est la remise en question légitime du patriarcat et donc la place des femmes dans la société, mais aussi celle des hommes. Globalement, tout passe par l'humour, alors à moins d'avoir un égo assez fragile et ne pas vouloir reconnaître la lutte féministe, vous devriez rire de bon cœur lorsqu'un stéréotype se fait gentiment démonter, ou au moins esquisser un sourire. C'était le cas dans notre salle, le public ayant même applaudi lors des crédits. La subtilité n'est pas spécialement de mise, rendant le message très clair et distinct, notamment au travers d'un long monologue éloquent de Gloria (America Ferrera) et de quelques répliques assassines de la jeune Sasha (Ariana Greenblatt). Cela passe aussi par l'excellent jeu d'acteur de Will Ferrell, un CEO de Mattel qui avec ses associés en prend pour son grade de manière assez burlesque, comme lors d'une séquence de course poursuite bien lunaire. Les scènes d'action à proprement parler sont assez rares, mais ne manquent pas d'intérêt pour montrer le caractère des protagonistes, dont une petite bataille qui aurait bien pu sortir tout droit de l'imagination d'un bambin jouant avec ses Action Man.
Ryan Gosling est lui royal en Ken, son personnage servant à montrer que les hommes sont eux-mêmes victimes du système en plus d'illustrer les ravages de la dépendance affective. Multifacette, son interprétation ne se résume pas qu'à ses répliques puisque l'acteur donne de la voix en chantant Just Ken et danse avec le reste du casting. Eh oui, plus qu'une simple satire, le long-métrage prend la forme d'une comédie musicale dès les premières minutes, avec des chorégraphies et chansons appuyant les propos sans casser le rythme, bien au contraire. La bande-son éclectique réunit bon nombre d'artistes de la scène internationale, dont Billie Eilish avec What Was I Made For?, qui encapsule bien le thème de la quête d'identité également abordé. Quant à Margot Robbie, ce rôle de Barbie était tout simplement taillé pour elle tant elle rayonne à l'écran, aussi bien drôle que touchante. La résolution de son arc narratif nous a pour le coup agréablement surpris... jusqu'à la scène finale, nous laissant dubitatif sur le message qu'elle délivre. Enfin, mention spéciale au rôle de Rhea Perlman, qui délivre une scène attendrissante et attendue.
Même si son scénario n'a pas prétention à être exceptionnel, ce long-métrage Barbie de Greta Gerwig est un bon divertissement feelgood qui parvient sans mal à délivrer des messages forts par le biais d'un humour satirique décapant, reflet de notre société actuelle par le prisme d'une poupée sexagénaire, dont l'image est devenue un symbole.
Note : 3,5 étoiles sur 5
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