Suite à l'initiative de Bouygues de faire casser le monopole de l'iPhone chez Orange, vous vous attendiez à une concurrence saine sur l'iPhone entre les 3 opérateurs mobiles ? Déchantez maintenant !
Tandis qu'Orange engrangeait des bénéfices records avec ses ventes d'iPhone V1 puis 3G ces deux dernières années, la concurrence ne pouvait rester de marbre devant l'appât du gain d'un tel gâteau.
C'est donc Bouygues qui a lancé le premier l'attaque en proposant à ses clients d'acheter un iPhone 3G chez Orange au plein tarif de 600 euros puis de le leur en rembourser 450 pour qu'ils l'utilisent sur le réseau Bouygues. SFR lui a immédiatement emboité le pas en proposant une offre similaire à ses clients, à condition qu'ils soient en fin de contrat d'engagement. Pour faire avaler la pilule tarifaire, SFR a même débridé son réseau 3G pour booster les accès internet depuis l'iPhone alors qu'Orange était embourbé en pleine crise avec ses clients sur le fameux bridage de la vitesse de son réseau 3G. Entre début juillet et fin décembre 2008 il fleurait bon être chez SFR avec un iPhone légalement débloqué pour profiter des avantages d'une concurrence en bonne et due forme.
Le Yalta de l'iPhone
Tout se gâte cependant lorsqu'en décembre Bouygues obtient la fin du monopole d'Orange sur l'iPhone 3G suite à une requête auprès de l'Etat. De là, les 3 opérateurs ont maintenant le droit de commercialiser chacun une offre iPhone pour leurs clients, et c'est dans la joie et la promesse d'une saine concurrence, toujours meilleure qu'un monopole, que tous les clients mobiles de France attendent les offres.
Hélas si les temps changent, les magouilles restent. Bien que déjà condamnés à verser 534 millions d'euros à l'Etat pour entente illicite sur le partage du marché des mobiles, les 3 opérateurs n'ont toujours pas renoncé à leurs petits arrangements frauduleux, et ce qui s'annonçait comme une saine concurrence entre opérateurs sur un même produit, va à nouveau devenir un Yalta du mobile.
D'abord les offres sont toutes équivalentes et présentent sensiblement les mêmes tarifs et conditions :
L'offre d'Orange
- Une offre à 40€ pour 1h de communication avec mails, internet et TV inclus en pseudo illimité
- La même offre à 50€ avec les appels vers l'international inclus
Sachez que le concept de pseudo illimité a été inventé par AOL il y a 10 ans. Il consiste à proposer une utilisation illimitée mais qui vous est restreinte en cas de trop forte utilisation. Dans le cas de l'iPhone, cela consiste donc à vous réduire la vitesse d'accès si vous dépassez un certain seuil de consommation data mensuelle. Pour prendre connaissance de ces conditions spécifiques, munissez-vous d'un microscope et tentez de les déchiffrer sur les sites des opérateurs comme ici chez Orange en bas de page :
Les conditions contractuelles volontairement illisibles d'Orange
Ensuite, il vous faudra tenir compte des limitations de chaque opérateur sur le produit. En effet si Apple a signé un partenariat exclusif avec Orange en 2007 pour lancer l'iPhone en France, ce n'est pas un hasard, mais bien parce que c'est le seul des trois opérateurs à proposer une couverture nationale Edge et 3G complète.
Chez SFR
L'offre de SFR
Si vous souscrivez un contrat iPhone chez SFR, ce dernier ayant un très faible réseau Edge, vous subirez des désagréments à l'usage quotidien, comme un temps anormalement long de commutation entre une antenne 3G et une Edge vous rendant injoignable ou coupant vos communications en cours le temps que votre iPhone commute de la borne 3G de SFR vers une borne Edge d'Orange mutualisée avec SFR.
Si vous êtes déjà titulaire d'un contrat illimythics SFR avec surf et TV illimités, il faudra soit le changer pour un illimythics spécial iPhone (et donc vous réengager 24 mois), soit le garder mais y ajouter l'option iPhone à 8€ par mois… pour avoir exactement la même chose ! Une close totalement abusive donc.
Avec les nouvelles applications SFR TV et SFR WiFi de l'AppStore, bien que détenteur d'un abonnement illimythics avec TV illimité, l'abonné ne pourra plus accéder à la TV sur un iPhone sans avoir d'abord changé son contrat en un illimythics iPhone ou ajouté l'option ad-hoc, et pareil pour le WiFi.
Chez Bouygues
L'offre de Bouygues
Si l'offre iPhone de Bouygues semble plus intéressante financièrement sur le papier, c'est pour mieux masquer qu'elle le sera beaucoup moins à l'usage puisque cet opérateur dispose d'une très faible couverture 3G nationale, vous risquez donc de vous retrouver à faire du Edge pour le prix d'un forfait 3G, plus les mêmes problèmes de coupure lors des commutations entre antennes d'opérateurs mutualisées comme décrit au paragraphe précédent.
Enfin ni SFR ni Bouygues ne peuvent actuellement proposer la fameuse Messagerie Vocale Visuelle, si pratique pour les abonnés Orange, faute d'accord avec Apple. Mais il est évident qu'elle arrivera bientôt et ne sera disponible que pour les abonnés ayant changé leur abonnement pour les nouveaux forfaits iPhone, soit une contrainte supplémentaire pour obliger les clients à changer leur forfait et se réengager.
Peu d'espoirs pour le client
Que peut-on conclure de tout cela ? Que nous sommes toujours les vaches à lait des opérateurs et que cela ne risque pas de changer malgré la condamnation d'entente illicite qui a été prononcée, c'est certain. Mais également que sous couvert de nous proposer un nouvel appareil et de nouveaux services, les 3 opérateurs ont augmentés de concert leurs tarifs et restreints leurs conditions d'utilisation.
Actuellement une faible lueur d'espoir réside du côté de Free, le quatrième candidat à la licence mobile, qui a bien du mal à accéder au sésame d'opérateur national tant les 3 complices en place lui mettent des bâtons dans les roues pour l'empêcher de venir semer la discorde dans un marché trafiqué. Avec ses habitudes d'innovation et de prix cassé, il créerait une réelle panique chez les trois autres qui se verraient contraints de suivre la baisse et réduire de ce fait leurs très confortables marges.
La commission européenne a également son mot à dire puisqu'elle publie régulièrement des alertes sur les coûts trop élevés par rapport à la moyenne européenne des minutes de communications et des SMS des opérateurs français.